Ballade de la Féconductrice

En novembre 2005, le magazine Instant-Mag publie un descriptif détaillé du film, décor après décor, scène après scène, et bobine après bobine, en y apportant quelques commentaires.

 

Prégénérique - extérieur jour - une église

    Vue d'en bas d'un escalier en pierre, une grille fermée. Sur une musique au piano, un homme en soutane, avec les cheveux longs, pousse la grille et descend une rue en escalier. Le prêtre traverse la rue, une valise à la main, sur un fond de bruit d'orage. Il croise un homme avec un cigare qui lui demande du feu. Le prêtre aide le passant, puis arrive dans une église. Une fois à l'intérieur, il se signe et entre dans le chœur, où se trouvent deux jeunes hommes nus, de dos, agenouillés, qui prient. Le prêtre passe derrière une chaire, ouvre un livre immense qu'il feuillette. Les deux hommes se lèvent alors, et viennent s'agenouiller auprès du prêtre. En musique de fond, des chœurs religieux. Pendant le sermon, l'un des deux hommes se met à jouer du pipeau Son Sexe Se dresse Comme   un serpent dompté par les sons de l'instrument (ndlr : n'essayez pas chez vous, c'est dangereux). Agacé, le hêtre s'interrompt, s'approche des deux hommes, qui enferrent ses jambes. Il ouvre sa valise, sort une paire de ciseaux et coupe le sexe de l'effronté musicien ! Plans sur les visages, notamment sur celui de l'homme au sexe coupé, qui hurle de douleur. Quand le sexe tombe à terre, il se transforme en marguerite.

    Sur une musique guillerette, le prêtre sort de l'église. Il aperçoit alors une jeune femme, assise sur le capot d'une voiture, la marguerite entre les dents, affichant un grand sourire. Elle le regarde avec insistance nettoyer ses ciseaux plein de sang. Effrayé, il s'enfuit. Le générique commence, avec en fond, des tableaux religieux représentant des crucifixions, des scènes de tortures et de nus. 

 

Intérieur Jour - Appartement

    Dans un salon diablement " seventies " On retrouve la jeune femme en train de boire. Un enfant entre dans la pièce. Elle l'embrasse. Il ouvre son cartable, et lui montre un grand livre, où l'on distingue vague- ment des femmes nues. Une musique primesautière débute. La femme et l'enfant se mettent à danser, en tournant, longuement, sur une musique entraînante, entêtante, interminable.

    La femme emmène l'enfant sur le balcon, puis rentre dans l'appartement pour lui faire couler un bain. L'enfant se déshabille et rentre dans la baignoire. Dans une pièce à côté, la fée (nous l'appellerons désormais ainsi) sort un bâton de rouge à 1èvres, et se brime le visage de façon sensuelle. La scène est entrecoupée avec une scène parallèle où l'enfant se savonne de façon suggestive, en remontant lentement vers sa cuisse. On ne voit cependant rien, car le bain est moussant. Retour à la pièce où la fée achève son maquillage, qui est un masque de clown. Elle se tire la langue dans le miroir. Lorsqu'elle rentre dans la salle de bain, elle est entièrement déguisée en clown, avec chapeau, pantalon large à carreaux, haut rayé marin, et bretelles. Elle se tient debout face à la baignoire, regarde fixement l'enfant, lui fait des grimaces. La fée fait des révérences, des ombres chinoises sur le mur, l'enfant est ravi et applaudit.

    Brusquement, gros plan sur une prise électrique au-dessus du lavabo. La fée s'empare de la rallonge, qu'elle balance nonchalamment à bout de bras, regardant toujours l'enfant. Subitement elle plonge la prise dans la baignoire, et l enfant se noie, électrocuté, sur une petite musique de piano. La scène s'achève sur un clin d'œil que la fée adresse au mort.

 

Extérieur Jour - Une rue

    Un clochard est assis sur une des passerelles qui surplombe une ligne de métro. Il boit au goulot d'une bouteille de vin, gémit des mots incompréhensibles. Les rares passants l'ignorent. Il finit par se faire vomir dans une écuelle, sort une serviette de table, sale son vomi avant de le manger d'un air satisfait, en le touillant. En arrière-plan, on voit la fée au loin, qui le regarde faire, puis s'approche de lui. Musique Jazzy au saxo qui débute. La fée s'agenouille auprès de l'homme, lui prend son écuelle des mains, lui caresse le visage. Il est fasciné, et lui sourit à pleins chicots ! A ce moment, la fée sort à nouveau son bâton de rouge à lèvres pour maquiller le clochard en clown. Elle l'embrasse, lui donnant un baiser fatal, puis le laisse mort. Les passants continuent de passer (puisqu'ils sont des passants), mais ne regardent toujours pas le pauvre garçon. Deux hommes lui lancent une pièce. Une vue sur Paris termine la scène. (Fin de la bobine)

Deuxième bobine - Extérieur jour - Une rue

    La fée évolue à travers un marché vide, dont il ne reste que les armatures des étals. Elle est toujours dans sa tenue de clown.

    L'homme au cigare, aperçu lors de la première scène avec le prêtre, la suit de loin. Il s'arrête pour éternuer. La fée passe devant une femme, qui porte un voile blanc vaporeux et brandit un écriteau portant l'inscription " toujours vierge". L'homme au cigare passe à son tour devant l'inconnue, s'arrête, lit le panneau, et lui fait un bras d'honneur. Puis il rejoint la fée sur un banc, dans un jardin public. Il s'approche progressivement d'elle. Plus loin, un homme à l'air triste est assis sur un banc et essuie ses lunettes. Lorsque l'homme au cigare regarde à nouveau vers la fée, celle- ci a disparu. à sa place, il y a un œuf avec un visage souriant peint dessus, qu'il lance à la tête de l'homme à lunettes.

Intérieur jour - appartement de la fée

    La fée joue du piano dans son salon. Elle a les yeux grimés par deux traits noirs qui partent de ses yeux et terminent sur ses joues (prémisses à la pochette de Sans logique ?) Une marionnette danse sur le piano et bat la mesure. La scène est entrecoupée par des plans serrés sur les jambes d'une femme qui s'avance dans le couloir. Une sonnette retentit. On retrouve les deux femmes dans le salon. La fée se vernit méticuleusement les ongles, tandis que l'autre sert du café, regarde son interlocutrice à plusieurs reprises, et reprend son tricot, avec en fond une musique chantée. La fée lève enfin son regard vers l'autre femme. Cette dernière lui montre son tricot débutant. Un malaise s'installe. La fée prend une position suggestive avec sa jambe sur l'accoudoir.

    S'ensuit un échange de regards et de sourires. assez ambigu, entre les deux femmes. L'inconnue continue de tricoter, puis se lève pour ramener un verre à la cuisine. On s'aperçoit alors qu'elle est enceinte. Une fois dans la cuisine, elle ouvre le frigo, et hurle en découvrant quelque chose qui reste caché au spectateur. Dans la panique, elle s'écroule lourdement sur le ventre. Pendant ce temps, la fée se maquille à nouveau, puis gagne la cuisine et regarde le sang s'écouler entre les jambes de la femme inconsciente. Elle s'agenouille, lui écarte les jambes, se retrousse les manches, enfile des gants, avant de relever la jupe de la femme et de la faire accoucher. Tout cela sur air de piano encore très primesautier. Gros plan sur l'enfant qui sort du vagin. La fée regarde longuement ses mains ensanglantées avec, en bruit de fond, des pleurs et des vagissements. Légitimement énervée, elle jette violemment le bébé au vide-ordures, puis traîne le corps de la mère dans le salon. Là, elle lui pose des dents de Dracula, lui cale la tête sur un livre, avant de passer un coup de balai sur le dos et les jambes de la morte pour l'épousseter. Elle s'arrête un instant, pensive.

 

Intérieur Nuit - chambre de la fée

    La fée est dans son lit, allongée, elle caresse un chien, allongé sur le dos entre ses jambes, les pattes écartées. On lui voit clairement les testicules. Elle le retourne brutalement le plaque entre ses jambes, et fornique avec l'animal. Bizarrement, on sent qu'elle y prend un plaisir incroyable (alors que le chien n'est même pas beau).

 

séquence finale

 

Extérieur Jour - Une rue

    Un agent fait la circulation. Un handicapé en fauteuil roulant traverse la rue, rentre malencontreusement dans l'agent, puis se fait aider par ce dernier pour traverser la rue. Plus loin, un aveugle à la démarche ataxique, avec une canne blanche, rentre dans un arbre. L'homme au fauteuil roulant poursuit sa route, et croise la fée qui lui barre la route. Elle est en capeline, arbore une canne noire à la main et a également un point rouge au bout du nez. L'handicapé et la fée se sourient, cette dernière tourne autour du fauteuil, enlève ses lunettes au paralytique, qui se bave dessus. Elle lui écrase ses lunettes d'un air sardonique et l'idiot se met alors à pleurer. La fée lui envoie un baiser, l'embrasse sur le front, et pousse violemment le fauteuil dans une pente. Au loin, l'aveugle s'approche  de sa démarche incertaine. Une violente collision s'ensuit. Plan rapide sur le mongolien encastré dans une voiture, et l'aveugle énucléé par sa canne !

    Sur ce, l'homme au cigare arrive, regarde la scène avec curiosité, et fait un bras d'honneur au borgne. L'agent de police présent en début de scène le voit, lui donne un coup de matraque qui s'avère être un énorme godemiché. Ils se battent. L'homme au cigare tabasse le gendarme à mort avec le godemiché, qui émet alors un jet mousseux en tombant à terre (ndlr : n'essayez pas chez vous c'est dangereux). Gros plan sur le visage tuméfié de l'agent. L'homme au cigare reprend tranquillement sa route.

 

Intérieur soir - Appartement de la fée

    Coucher de soleil vu de la tour dans laquelle habite la fée. Celle-ci se trouve dans la pénombre, devant une bougie qu'elle souffle. Elle est dans son salon et il y a des dizaines d'autres bougies allumées dans la pièce. Elle passe dans la cuisine, ouvre le frigo, et en sort l'enfant électrocuté, qu'elle assoit devant un miroir, et grime en clown triste. Elle lui noue une ficelle autour des mains, et en joue comme d'une marionnette, avant de le ranger soigneusement dans une valise. A ce moment, de la fumée provient du salon. La fée s'y précipite, et découvre qu'un feu s'y propage. Elle quitte précipitamment l'appartement avec la valise contenant l'enfant. Dans la cage d'escalier, une sorte de monstre poilu se lance à sa poursuite, et la fée croise dans sa fuite chacune de ses victimes : la femme enceinte, qui lui tombe dessus ; la vierge de la rue. qui tente de l'attraper ; le clochard, assis dans un coin. La fée se précipite dehors. Vue de son balcon en feu. En fond sonore, des voix d'hommes comme dans une CB, qui suggèrent l'arrivée de la police.

 

Extérieur jour - cimetière

    Cimetière isolé, au milieu de champs désertiques. Il y a de la neige sur le sol. Un bruit de vent en fond. La fée rentre en faisant grincer le portail (oui, comme dans le Tour 89, encore). Elle évolue entre les tombes, s'arrête un instant sur l'une des sépultures. Derrière elle, une main s'agrippe à la tombe, la fée ne la voit pas, se lève et repaie. D'autres mains surgissent de derrière les tombes, c'est amusant comme tout. La fée emprunte un sentier boueux, derrière le cimetière. Il n'y a que le bruit du vent, de ses pas, et d'une cloche qui se met à sonner au loin. Sur son passage, des mains toujours plus nombreuses continuent de sortir des tombes, des arbustes, etc. La fée arrive dans le champ jouxtant le cimetière, qui s'étend à l'infini, avec un horizon plat (la plaine de Désenchantée pourrait y faire référence), qu'elle se met à traverser avec sa lourde valise.

Extérieur jour - Une plage (Etretat)

    Image d'un coucher de soleil en bord de mer, plage de galets. La fée arrive avec sa valise. Un premier panneau indique " La mer", un autre indique en direction opposée " Le per". Sur la même plage, on retrouve le prêtre émasculeur du début, avec lui aussi sa valise. Il est pieds nus, se signe dans le désordre, renonce, mange des tufs, fouille frénétiquement sa valise. La fée s'approche, puis le tue avec un couteau. Plans sur le flux et le reflux de la mer qui se brise sur les rochers. Sur ce, l'homme au cigare arrive, trouve le prêtre mort, assis, grimé en clown. Il le pousse d'une chiquenaude, et le corps s'écroule. Plus loin, la fée joue avec l'enfant mort, qu'elle anime comme une marionnette sur la plage (Sans Contrefaçon). L'homme au cigare s'approche de la fée, qui laisse tomber l'enfant en le voyant. Long échange de regards entre les deux, qui finissent par se rapprocher lentement, sur la plage. L'homme a un pistolet au poing. Lorsqu'il se rejoignent, il range l'arme dans la poche droite de son manteau, jette son cigare, et embrasse longuement la fée. Elle en profite pour saisir son arme et la pointe vers lui. A nouveau un long échange de regards. uniquement rompu par le bruit des vagues.  L'homme sourit, prend un cigare, qu'il allume lentement, résigné. La fée le vise toujours, il recule, toujours face à elle, comme pour tenter de s'enfuir doucement. Long moment suspendu.

    Elle tire, l'homme s'écroule, la scène est au ralenti. Il se relève, elle tire de nouveau, il tombe à genoux sur les galets, elle lui tire une balle en pleine tête. Elle jette le pistolet, et rejoint l'enfant marionnette.

    Agenouillée auprès de celui-ci, elle sort un couteau, caresse son visage avec la lame, avant de couper les liens de sa " marionnette". Au loin, les vagues viennent mourir sur la plage. La fée boit une petite fiole, titube, vomit, court vers la mer.

    La caméra s'éloigne, on entrevoit les falaises d'Étretat au loin, le corps de la fée flottant dans l'eau, puis son chapeau. Sur la plage, il n'y a plus que le pyjama de l'enfant. Ce dernier est vu en plan fixe de dos, de profil, puis de face, avec un sourire. 

Fin - Générique

 

Instant-mag, novembre 2005, pp. 24-26.

 

Entrée Ballade de la féconductrice En Concert Giorgino LIVE à Bercy Jacquou le Croquant