Dossier de Censure

 

Contexte 

     Une fois le scénario de Giorgino écrit et déposé, Laurent Boutonnat obtient l'agrément provisoire du C.N.C (Centre National de la Cinématographie) qui lui permet de se lancer dans la pré-production du long métrage.  On retrouve dans le dossier de censure de Giorgino le devis daté du 14 décembre 1993 du réalisateur pour le film envoyé au C.N.C. La demande de subvention porte sur un coût total du film estimé par la société Heathcliff S.A. à 70 149 383 Frs.

 
Selon les dispositions prévues par la loi, le film Giorgino n'aurait jamais dû être aidé par le compte de soutient du Centre National de la Cinématographie. Le film de Laurent Boutonnat en effet ne respecte pas les dispositions de l'article 13 bis du décret du 30 décembre 1959 qui précise que les prises de vues en studio doivent être réalisées dans un pays de la Communauté Economique Européenne ou le cas échéant dans le pays co-producteur du film[1]. La France étant le seul pays où résident les sociétés de production du film[2], Giorgino n'aurait pas dû compter sur le soutien du C.N.C. Cependant Laurent Boutonnat a pu obtenir une dérogation du ministre de la culture aux obligations signalées par la loi, compte tenu de l'ampleur (aussi bien financier qu'artistique) du projet. L'agrément a donc été accordé, néanmoins assorti d'une réduction de 30% sur le taux de calcul du soutien financier. Le film, est-il signalé sur la lettre, bénéficie de la classification en tant qu'œuvre européenne.

    Après 10 mois de post-production, en mai 1994, le film est présenté au distributeur AMLF. Lors de cette première projection, le film dure 4h10, ce qui est jugé trop long par la distribution. On ordonne donc à lettre confirmant au comité de censure le report de la sortie du film Boutonnat de faire des coupes et il ramènera son film à une durée de 3h15 puis 3h03. Plusieurs scènes et éléments d'intrigues devront être supprimés. Par une lettre présente dans le dossier de presse de Giorgino, on retrouve la signalisation faite par Paul Van Parys[3] le 23 juin 1994 au C.N.C de la mise à disposition du film pour le 20 juillet 1994. Il est mentionné sur cette lettre que l'exploitation en salles est retenue pour le 24 août 1994 et que le métrage du film est de 4 500m.[4] Longueur du film étrange car elle sera signalée de 5 180 m. le 21 septembre 1994 lors du passage en sous-commission ainsi que pour le payement de la taxe de vision (5 178 m.), et de 5 005 m. pour la séance plénière du 4 octobre 1994 ! Si ce dernier écart est facilement expliqué par une lettre adressée par Boutonnat à la commission, et que nous détaillons plus bas, la différence de métrage entre le 23 juin[5] et le 21 septembre[6] 1994 reste inexplicable : Alors que le film est censé être à plusieurs reprises coupé et amputé de une heure puis de un quart d'heure, la durée (si on en croit le métrage déclaré par Heathcliff S.A.) aurait augmenté de 25 minutes…

   

Après un passage en sous-commission des pré-bandes annonces et de la bande annonce du film, la sortie du film initialement prévue le 24 août 1994 est repoussée tout d'abord au mercredi 20 septembre, le montage étant loin d'être terminé. C'est à cette date que le dossier de presse et le plan de promotion du film sont imprimés. Dans une autre lettre datée du 13 juillet 1994 contenue dans le dossier de censure, Paul Van Parys, qui travaille pour Laurent Boutonnat demande de repousser à début septembre la présentation prévue en commission initialement le 24 juillet 1994. La sortie du film étant encore repoussée au 5 octobre. Ce à quoi une note interne de la commission de contrôle des œuvres cinématographiques réagit en faisant circuler l'information suivante :

"La S Heathcliff a téléphoné le 11 août 1994 et est d'accord pour décaler le passage du film du 30 août au 8 septembre (afin de laisser la place au film Sauve et Protège)" (sic)

 

Sauve et Protège (reprise d'un film tourné en 1989 par le russe Aleksandr Sokourov) pouvait constituer une sérieuse concurrence pour Giorgino, pouvant attirer le même public de drames amoureux. En effet, Sauve et Protège est une adaptation de Madame Bovary, de Flaubert.

 
 

    Pourtant  il n'y a aucune trace du passage du film le 8 septembre, ni en sous-commission, ni en commission plénière. On trouve l'explication d'un nouveau report et de sa cause dans une lettre archivée également dans le dossier de censure du film et envoyée le 24 août 1994 à M. Jean-Claude Debray, qui s'occupe du film au C.N.C (date initiale de sortie du film sur les écrans) :

 

"Cher M. Debray, le film Giorgino a été programmé à la commission de classification des œuvres cinématographiques pour le 8 septembre 1994. Malheureusement nous ne disposerons pas encore de copie standard à cette date car nous travaillons actuellement sur le montage du film. Auriez-vous la gentillesse de bien vouloir nous reprogrammer à une date ultérieure à partir du 15 septembre, sachant que la sortie du film est prévue pour le 5 octobre 1994."

Paul Van Parys

 

    Donc la date de la 3eme sortie prévue du film est avancée : c'est le 5 octobre. Le doublage en français du film prend du temps, et la période entre le moment où le film sera prêt se trouvera très proche du jour de sortie en salle. Tout sa passera donc dans la précipitation, le film subissant les dernières coupes de montage et les passages en commissions de censure la semaine de la sortie en salle. 

   

L'Histoire

 

            Le volumineux dossier de censure de Giorgino comporte entre autres deux exemplaires du synopsis, le générique de l'œuvre telle qu'elle apparaît à l'écran, le découpage dialogué en français, en anglais, la liste des sous-titres français et cinq exemplaires de la formule de renseignements qu'a du remplir Laurent Boutonnat : On y retrouve les informations techniques habituelles sur le film telles que les lieux de développement du film (aux studios Barrendov près de Prague, et aux laboratoires Eclair en région parisienne), le format de pellicule utilisé (35 mm. 2.35 x 1 anamorphosé, son sur bande magnétique agfa optique Dolby Stéréo (SRD), la longueur de la copie de prise de vue (140 000 m.), celle de la copie présentée (finalement 5 178 m.) et les sociétés ayant travaillé sur les effets spéciaux : Excalibur pour les trucages optiques tels les décors peints de Paris sous les bombes, Eurocitel, Duboi pour les effets numériques, Microfilm et Bi-Solo pour le matériel d'effets spéciaux. On trouve aussi le synopsis officiel du film tel que Laurent Boutonnat l'avait conçu il y a déjà plusieurs années :

 

1918, peu avant la fin du conflit mondial… Gazé, miraculé mais probablement condamné à une mort prochaine, le docteur Giorgio Volli, citoyen français est rendu à la vie civile. Orphelin célibataire, étranger aux préoccupations du monde qui l'entoure, il n'a qu'un seul désir : retrouver le groupe d'enfants inadaptés dont il s'occupait avant-guerre. Sa quête le mène jusqu'à Chanteloup, un hameau perdu au fin fond d'une région montagneuse (NDR : il est précisé dans le résumé succin qu'il s'agit du Jura). Là, il ne retrouve qu'un orphelinat vide battu par les vents glacés d'un hiver précoce, des hordes de loups effrayants, un marais infanticide, un prêtre unijambiste et des femmes rudes que la solitude et la détresse ont parfois rendues cruelles. Des enfants –dans ce lieu oublié du monde et peut-être même par Dieu- il ne reste qu'un cauchemar. Un cauchemar d'enfant où l'amour a les traits d'une jeune fille fragile qu'on ne peut embrasser sans embrasser la folie. Il est certains contes dont personne ne souhaite être le héros.

 

Laurent Boutonnat, qui a à présent du métier, sait que dévoiler franchement la teneur de son film ne l'empêchera pas s'attirer les foudres des membres qui seront présents. C'est pourquoi il a fait une description du film en y mettant son style, mais sans tenter de fourvoyer la commission en expliquant trop, en interprétant, en s'excusant d'avance.

 

Les passages en sous-commissions

            En septembre, lorsque le film passe enfin en sous-commission de classification, les membres connaissent de nom le long-métrage puisque le pré-film annonce du film est déjà passé devant leurs yeux quatre mois auparavant, le 26 mai 1994. Également soumis à la censure, toutes les bandes-annonces et autres teasers doivent être approuvés afin de programmer sans danger pour la jeunesse leur projection avant un film de même catégorie. Un descriptif est apporté à ce pré film-annonce, qui est en fait ce qu'on appelle communément un teaser, d'une durée de vingt secondes :

 

Pré film-annonce d'un film français : Une voiture à cheval sur une petite route. Deux visages. Homme et femme s'éclairent dans la nuit… Un climat de mystère annoncé. Commission : Avis tout public unanime.

 

    Toutes les personnes présentes apporteront sur le dossier la mention "Rien A Signaler", que ce soit le ministère des affaires sociales, ou les personnalités du métier : Laurent Alloneau, Jacqueline Boes, et Valérie Uttscheid-Moch. En conséquence le visa en question a été délivré le 19 mai 1994. Ce n'est que le 28 juillet 1994 que la sous-commission chargée de délivrer le visa de censure de la bande annonce officielle se réuni, alors que Paul Van Paris vient d'envoyer une lettre au C.N.C demandant un nouveau report de la sortie du film au 5 octobre 1994. On notera que sur le procès-verbal de sous-commission daté du 4 août 1994, au classement du genre, le film est classé dans la catégorie "Horreur-Epouvante" ! Alors que rien, dans cette bande-annonce, ne laisse entrevoir une scène de violence ou même quelque visage grimaçant… Quoi qu'il en ait été, les trois personnes présentes, Pierre Frantz, Monique Grégoire et Pierre Morelli prononcent un verdict "tous publics".

 

Après les nombreuses demandes de report demandées par Laurent Boutonnat à la commission de classification des œuvres cinématographiques, un arrangement est finalement trouvé pour le passage du long-métrage le 21 septembre 1994 à 9h30. Les plusieurs demandes de la production archivées dans le dossier de censure pour que le film passe directement en séance plénière ont été rejetées par le C.N.C.

C'est précisément parce qu'il ne restait qu'une semaine au film pour passer dans les deux commissions, laisser statuer les membres et obtenir le visa d'exploitation que Laurent Boutonnat avait sollicité le renvoi immédiat de son film en commission plénière, sans le passage en sous-commission. On imagine aussi très bien que le réalisateur, conscient des scènes choquantes parsemées dans son film, se dise que de toute façon, tôt ou tard, le long-métrage passera devant une commission plénière (nécessaire si la sous-commission laisse des doutes sur le visa à attribuer). Seulement c'est une règle, que la production semblait alors ignorer, que tous les films (choquants ou non) sont projetés intégralement et obligatoirement en sous-commission dans un premier temps. Des adjoints de membres titulaires et suppléants nommés par le ministre de la culture sont présent lors des sous-commissions mais n'ont aucun droit de vote lors de commissions plénières, lesquelles étant réservées d'usage aux titulaires[8].

 

Pour présenter le film à la sous-commission, le C.N.C envoie une lettre à Heathcliff S.A. demandant la remise du dossier complet du film au siège du C.N.C pour le vendredi 16 septembre 1994 avant 12h00, et la déposition de l'œuvre en version définitive le 19 septembre avant 12h00. C'est donc le 21 septembre 1994 que le film passe finalement en sous-commission, finalement sous une classification en tant que "drame", en l'absence de Laurent Boutonnat. Bien moins que des extraits précis du film, les membres présents font porter l'accent de leurs critiques sur l'atmosphère générale de l'œuvre :


"Le climat du film, dramatique et sinistre, avec quelques scènes de folie (en particulier dans l'asile) est excessif, donc assez incrédible (sic) pour des adultes, mais peut être impressionnant pour des enfants. Proposition d'interdiction aux moins de douze ans." Jacqueline Boes

 

"Atmosphère dramatique qui peut paraître artificielle a des adultes mais qui peut impressionner des enfants. Particulièrement la scène dégradante des fous enfermés dans une cave d'hôpital psychiatrique. Proposition d'interdiction aux moins de douze ans." M. Jane Fortunel

 

"Une histoire sinistre traitée de façon intentionnellement cauchemardesque, l'origine du drame étant (non montré) l'assassinat –ou la mort- d'orphelins. Interdiction aux moins de douze ans." Henri Chazalette

 

Le rapporteur Jacqueline Boes pour la sous-commission conclut par ces lignes, lignes qui figureront dans la lettre adressée au ministre de la culture :

 

"L'ensemble de la sous-commission une interdiction aux moins de douze ans ou, au minimum, un avertissement (pour un des membres). Le film se déroule dans une atmosphère sinistre, à la limite parfois du cauchemar et certaines scènes (exemple les fous dans un asile sombre et malpropre) peuvent impressionner les enfants. Trop de fous, de malades, de morts évoquées …dans un décor glacé."

   

Passage en commission plénière

 

    Les derniers changements de montage ayant été opéré dans la plus grande précipitation, afin d'éviter au film un troisième report de sortie alors que toute la promotion déjà entamée annonce la sortie au 5 octobre, la séance plénière a lieu en catastrophe au dernier moment, suite aux courriers et coups de téléphones paniqués de la production. Si Laurent Boutonnat n'obtient pas le visa d'exploitation le mercredi 5, son film ne sera pas autorisé à sortir sur les écrans. C'est pourquoi la commission plénière se réunit le mardi 4 octobre 1994, veille de la sortie du film, pour statuer sur son éventuelle censure. Entre temps, un courrier de Laurent Boutonnat lui-même écrit le 26 septembre 1994 arrive au siège du C.N.C. et remet en question le bien-fondé des réserves émises par la sous-commission de la semaine d'avant, qui se retrouve en partie invalidée :

 

Lettre annotée et signée par Laurent Boutonnat prouvant 7 minutes de coupes dans Giorgino avant le passage en séance plénière

 

Au stylo rouge est ajouté sur la lettre l' indication qui ramène le film d'une durée de 3h03 à la durée de 2h57:

 

Nouveau métrage effectué le 29 sept. 94 = 5.005 mètres.


C'est donc le 4 octobre, à la veille de la sortie du film que Laurent Boutonnat saura quel sort réserve la censure à son film pour le lendemain. La séance ayant été programmé à la dernière minute, aucun représentant du gouvernement n'est présent, mis à part Hubert Astier qui est chargé de rédiger le compte rendu pour Monsieur le ministre. Un collège de professionnels du cinéma assistent néanmoins à la projection parmis lesquels Laurent Thiry, Martine de Clermont-Tonnerre, Thierry Forte, Marie-Hélène Edeline, Antoine Virenque, Alain Lavalle et Jean Dreville. Le compte rendu ci-dessous laisse entrevoir une certaine forme de contre-cœur au classement pour mineurs de plus de douze ans. De manière exceptionnelle dans les dossiers étudiés un contrepoint est fait entre le contenu du film en tant qu'élément justifiable d'une éventuelle censure, et le film lui-même en tant qu'objet esthétique. On y parle pour une fois (certes brièvement) de mise en scène, ou encore de jeu de l'acteur.

 

"Ce film très long, ce qui risque de décourager une partie du public, notamment jeune, comporte cependant, malgré la qualité du tournage, des images et de nombre d'acteurs, trop de scènes violentes. Telles que celles dans l'hôpital psychiatrique, pour hommes au début, puis pour femmes à la fin, ou dans le village avec les vieilles femmes avinées et agressives, de nature à perturber de jeunes enfants. De plus, le climat général assez morbide ne contrebalance pas l'effet de ces scènes. C'est ce qui a déterminé à une forte majorité l'avis de la commission pour une interdiction aux moins de douze ans."       Hubert Astier

 

    Les sept minutes supprimées au dernier moment ne sont que des transitions, dont l'amputation n'entrave pas la compréhension du film mais ne faisait qu'ajouter du mystère à la compréhension du film. Elles n'auraient probablement pas forcé la commission a statuer différemment face à Giorgino, ces quelques plans relevant plus de l'ornement onirique que du "sinistre cauchemardesque". Voici un des bouts de scènes supprimés au dernier montage, tel qu'elle est indiquée par le scénario officiel du film, contenu également dans le dossier de censure :

 

EXTERIEUR JOUR / CARREFOUR-CALVAIRE

A une croisée de chemins, un calvaire dont la croix est coiffée d'un casque de soldat français. Le vent fait se balancer le casque qui grince contre la rouille croix. Giorgio arrête sa carriole. Il ôte son chapeau et en sort une carte d'état-major. Il remet son chapeau et déploie la carte devant lui comme un journal. Attiré par un bruit alors qu'il est plongé dans la lecture de sa carte, Giorgio relève lentement les yeux pour découvrir à côté de son cheval, une vieille femme vêtue de noir qui la regarde fixement. Un peu plus loin derrière elle, grosse charrette attelée à un cheval est arrêtée sur le bord d'un autre chemin. Assis sur la charrette de dos, la silhouette immobile d'un enfant, vêtu de noir. Il a une grosse tête hérissée de cheveux en brosse et des oreilles décollées. Giorgio sourit timidement à la vieille femme:

GIORGIO Excusez-moi, madame, je cherche la route de Chanteloup ...

La vieille femme ne répond pas. Elle se contente de désigner le calvaire.

GIORGIO (parlant plus fort et articulant) Je vais à Chanteloup... Chan-te-loup... l'orphelinat du docteur Degrâce! ... Chanteloup !

La vieille désigne à nouveau la croix puis se détourne pour rejoindre la grosse charrette.

GIORGIO (souriant) Merci, Madame ... Merci!

La femme se retourne et désigne une nouvelle fois la croix. 

GIORGIO Oui, oui, merci, je me débrouillerai ...

Giorgio replie sa carte et la remet dans son chapeau, tout en fixant le dos de l'enfant à la grosse tête. Aux sifflements du vent se mêle un lointain hurlement de loup. Giorgio fouette son cheval...

 

…Pas de quoi fouetter un chat justement dirons-nous. Plus sérieusement, les commissions plénières sont soumises an quorum de treize voix par l'article 2 du décret de 1961, sans possibilité de délégation de voix. Sur les vingt voix de la commission pour Giorgino (conservées dans l'enveloppe de vote encore scellé dans le dossier de censure) cinq d'entre elles autorisaient la projection à tous les publics, et les quinze autres se prononçaient pour une interdiction aux mineurs de moins de douze ans. Le ministre de la culture s'est bien entendu rendu immédiatement à cette décision et Giorgino sorti donc le lendemain dans les salles, in extremis, avec cette interdiction.

 

    Depuis la sortie du film, aucune ressortie en salle ni aucune diffusion télévisée[7] n'a été faite sur le film. C'est en cherchant dans le volumineux dossier de censure archivé à Bois-d'Arcy en région parisienne que l'on trouve l'explication de la "malédiction" qui entoure ce long-métrage depuis sa sortie :  On découvre que Laurent Boutonnat a racheté l'intégralité des parts financières de Polygram D.A., ce qui fait de lui le seul détenteur de son film au monde. C'est pourquoi le 23 mars 1995, six mois après la sortie du film, le C.N.C reçoit de la main même de Laurent Boutonnat une lettre où il explique le nouveau statut financier de son film. Lettre à laquelle le C.N.C répond par la voix de la directrice de la production cinématographique de l'époque, Elisabeth Flüry-Hérard :

 

"Monsieur, vous m'avez informé que votre société s'était substituée à la société Polygram Audiovisuel dans la production du film Giorgino, mis en scène par Laurent Boutonnat, pour lequel vous m'avez demandé l'agrément d'investissement. J'ai pris acte de l'inscription au registre public de la cinématographie et de l'audiovisuel du contrat du 4 février 1994, aux termes desquels votre société se trouve cessionnaire de la totalité des droits et obligations de la société Polygram Audiovisuel." (…)

  lettre du C.N.C concluant le transfert des droits de production du film de Polygram à la société de Laurent Boutonnat

lettre du C.N.C concluant le transfert des droits de production du film de Polygram à la société de Laurent Boutonnat

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(note : les informations d'ordre financier ont été noircies)

   

 

Laurent Boutonnat a ainsi le droit de regard définitif sur toutes les exploitations qui seront faites de son film Giorgino, il est capable de s'opposer sans discussion à toute exploitation publique. Ce qu'il fait fréquemment d'ailleurs. Le 29 septembre 2001 est organisée une projection au cinéma Max Linder à Paris par une association de loi 1901. Laurent Boutonnat refusera la projection qui devra être annulée et remplacée par les films des concerts tournés par Boutonnat, qu'il laisse, eux, toujours projeter en salle. 

enquête et rédaction : Jodel Saint-Marc
février 2002 - décembre 2004.

Notes :

[1] Les scènes d'intérieur du film et quelques scènes de faux extérieur (les marais) ont été tournées aux studios Barrendov à Prague. Les pellicules des scènes tournées ont également été développées là-bas.

[2] Heathcliff S.A. et Polygram D.A.

[3] Associé de Laurent Boutonnat pour Heathcliff S.A.

[4] Ce qui ferait une durée de film de 2h40 environ.

[5] Date à laquelle le film est encore sensé faire 3h15.

[6] Date des avant-dernières coupes de montage effectuées le 29 septembre.

[7] Mis à part les cinq diffusions sur la chaîne Canal Plus prévues contractuellement par la co-production.

[8] Bien qu'ils conservent en théorie la possibilité de siéger en sous-commission.

 

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