L'histoire

"Il est des lieux oubliés où les mystères demeurent. Des lieux qu'un homme doit parcourir à la recherche de la vérité.Des lieux où une femme en péril détient la clé du secret. Des lieux où les âmes innocentes sont menacées par la nuit. Qui sait la part d'obscurité qui se cache dans le cœur d'un homme, Dans l'esprit d'un enfant, dans les âmes des damnés ?"

 

l'histoire de Giorgino...    Nous sommes à Paris en octobre 1918. Gros plan sur le visage d'un enfant qui attend, sur un banc, face à un officier qui attend, lui aussi. Les deux garçons s'amusent jusqu'à l'arrivée d'une infirmière (présence mystérieuse de cette femme au début du film comme au début de l'œuvre avec Mylène FARMER - cf. Maman à Tort). Dès le départ, elle croit que Giorgio VOLLI est l'enfant : le thème est planté, BOUTONNAT résume son film : "-Giorgino c'est les derniers jours d'un homme et son parcours vers l'enfance". Giorgio, un lieutenant démobilisé pour cause d'injonction de gazes suit l'infirmière et entre dans le cabinet du docteur militaire. Ce docteur est le premier des fous dont est peuplé Giorgino. Il se saoule à l'absinthe, alcool mortel, et  ose prédire à
 

Giorgio un avenir court : "logiquement vous êtes mort". Après quelques minutes de visite, un infirmier vient prévenir le docteur que le patient DUMOULIN vient de mourir, suite à son amputation. C'est en fait le père de l'enfant qui faisait la grimace à Giorgio quelques instants plus tôt dans le couloir. Le docteur s'en fiche "Et alors ? C'est pas mon boulot, donnez le à l'infirmière, celle qui a deux gros... enfin vous savez.". 'Condamné à mort' par le docteur, Giorgio repart, et assiste dans le couloir à la longue scène qui introduira le film : celle où l'enfant, à présent orphelin se fait raccompagner par l'infirmière dans un endroit qu'on préfère ne pas connaître.     Si on regarde bien, tout le film est contenu dans ce pré-générique. Il y a l'enfance, dès la première image, la folie, la religion omniprésente, les loups (présents sur l'affiche du cabinet médical), et la guerre qui défigure tout. L'écran devient noir et laisse progressivement apparaître ce vers quoi tout cela aboutit : GIORGINO.

 

    Giorgio VOLLI, avant la guerre, travaillait à la fondation ROUX, avec douze orphelins attardés. Il n'a jamais connu ses vrais parents, il est lui même orphelin de père et de mère. Il passe acheter des sucres d'orge pour leur offrir et se dirige vers la fondation. Les chambres sont vides. La gardienne lui explique que les enfants ont été envoyés à la montagne suite aux bombardements. Ils sont d'après elle placés dans l'orphelinat du docteur DEGRACE, qu'on pourrait placer dans les Vosges ou en Haute Chartreuse. Le seul contact qu'elle ait entretenu avec eux est une relation vaguement épistolaire. Les enfants lui envoient des dessins de l'orphelinat avec des animaux qui pourraient bien ressembler à des loups... Giorgio VOLLI achète un cheval et part en calèche à la recherche de cet orphelinat. Il arrive à proximité de celui-ci, en moyenne montagne en traversant un village aux rues désertes : Chanteloup. L'aubergiste lui indique la route qui mène à l'orphelinat du docteur Degrâce, surprise que quelqu'un s'intéresse à ce vieux manoir. L'orphelinat est une vieille maison bourgeoise du XIXe siècle, logée à la lisière d'une forêt noire, au sommet d'une pente enneigée. Giorgio s'apprête à revoir les enfants qu'il n'a pas vu depuis quatre ans, en 1914, date à laquelle il a été mobilisé. La gouvernante vient lui ouvrir, l'air terrifiée. Giorgio se présente en tant que docteur. La femme qui lui fait face saute sur l'occasion et l'entraîne au premier étage, où Elisabeth Degrâce, la maîtresse de maison est allongée inanimée sur le lit. Le docteur l'ausculte et se met rapidement à lui faire des massages cardiaques. La pauvre femme réagit de moins en moins et ne respire plus. Le docteur lui enlève alors le bandeau noir qu'elle porte autour du cou et s'aperçoit qu'elle porte une profonde marque qui lui enserre la gorge. La femme, qui s'est pendue récemment, meurt. Le docteur VOLLI ressort de la chambre et fait un discret signe d'impuissance à Marie, la gouvernante qui se trouve à l'autre bout du couloir. Elle se retourne alors et reproduit le même signe à une jeune fille se situant en bas du grand escalier qui mène au rez-de-chaussée. Cette jeune femme est Catherine, la fille de Mme Degrâce qui vient de décéder. Elle court dans la chambre pour pleurer devant la dépouille de sa mère. Marie la gouvernante s'approche alors de Giorgio pour tenter de voir s'il s'est aperçu que la femme s'était pendue. Elle lui explique que si les gens du village apprennent qu'elle s'est pendue, elle n'aura pas de messe et n'aura pas droit à l'enterrement catholique. Il promettra de rester discret. Avant que Marie ne parte prévenir l'abée Glaise, le curé du village, Giorgio lui demande si le docteur Degrâce, qui est censé s'occuper des enfants est là. Elle lui répond que non, qu'il est à Sainte-Lucie, à l'hôpital, et qu'il ne reviendra peut-être jamais. "-Et les enfants, où sont-ils ?". La réponse de Marie est simple : les enfants sont morts, depuis longtemps. Et elle s'en va.Mylène FARMER lors de sa première apparition dans le film

    Giorgio, seul dans l'escalier, reste immobile. Les douze enfants sont morts. Lui qui voulait, sachant qu'il va mourir, retrouver l'enfance, devra s'en passer. Il lâche son paquet de sucres d'orge qui se renverse sur les marches de l'escalier. Paniqué, il remonte à l'étage et ouvre toutes les portes des chambres. Elles se ressemblent toutes : des lits de différentes tailles sont disposés les uns à côté des autres, il n'y a rien d'autre, si ce n'est de vieux jouets. Arrivé au bout du couloir, il se retrouve face à Catherine devant le cadavre de sa mère. Elle se retourne des larmes plein les yeux, s'avance lentement vers lui, le contemple longuement, l'embrasse soudainement sur la bouche puis s'enfuit. Giorgio tentera en vain de la rappeler, tandis qu'elle court dans la nuit en direction des bois... Catherine est à la limite de l'autisme. Elle fuit les gens depuis la disparition des enfants.

 

    Giorgio entre, épuisé, dans l'auberge du village qu'il avait traversé dans l'après-midi. Une tablée de vieilles femmes est là, silencieuses. Elles sont déjà au courant de la mort de Mme Degrâce et regardent Giorgio comme quand un étranger entre pour la première fois dans un village. Le comptoir est sale. Une photo de jeune militaire est disposée derrière. Après renseignements, il s'agit de Marcel, le fils de la femme aubergiste, qui est parti combattre dans les balkans. Giorgio prendra une chambre pour la nuit. La question qu'il pose alors est celle qu'il se posera jusqu'à la fin de sa vie : "-Qu'est-il arrivé aux enfants ?". Parce que sa jeune fille écoute la conversation dans un coin de la pièce, Harmelle l'aubergiste crie que c'est à cause des loups. Après qu'elle soit allé se coucher, elle se ravisera et dira à Giorgio qu'en fait personne ne le sait. Les femmes attablées, elle, disent que c'est Catherine, la fille du docteur Degrâce qui les a tué, les assommant à coup de bûche pour les noyer dans un marais voisin. C'est elle qui les emmenait souvent en promenade dans la forêt. Ce jour là le docteur Degrâce leur aurait fait une piqûre qui leur aurait été fatale. Difficile pour Giorgio, qui est fatigué et un peu saoul de décoder le vrai du faux dans ces ragots. Il s'écroule par terre avant d'être accompagné dans sa chambre par l'aubergiste. Au milieu de la nuit, il est obligé de se faire des piqûres, ce qui reveillera l'aubergiste qui viendra le rassurer derrière sa porte en l'appelant Marcel... comme son fils. Chez tous les personnages que le héros rencontre, il y a une part de folie, plus ou moins visible, qui fait que leur comportement est douteux. Harmelle l'aubergiste semble être, quand à elle, une fausse méchante. Sous ses abords de vieille femme sévère, doit se cacher beaucoup de compassion.

   

    Le lendemain matin, Giorgio VOLLI se rend tout d'abord au domicile des Degrâce où il est refoulé sans ménagement à l'entrée par la gouvernante Marie sous prétexte qu'il réveillerait Mlle Degrâce "éprouvée par la mort de sa mère". On l'entendra juste crier le nom de Marie de sa chambre, prouvant qu'elle ne dormait pas. On s'aperçoit ici que Marie a un comportement également anormal, et elle se révèlera même être le personnage le plus pervers dans sa folie. Comme il n'a pas pu avoir les informations qu'il cherchait auprès de Marie, Giorgio se dirige vers l'église du village, qui est est retirée à quelques kilomètres au milieu d'une plaine déserte. Il espère y trouver l'abée Glaise qui détient probablement la clé du mystère quand à la disparition de ses douze orphelins. L'église est vide. Giorgio s'avance et voit des tables d'écoliers, prêtes pour la classe, puis, au dessus de l'autel un christ qui semble fait à la main. La tête, très inclinée rappelle celle de Mme Degrâce qui, la veille était marquée au cou. Giorgio va prendre un cierge parmis ceux disposés sur le côté, monte sur une chaise et s'approche de la gorge du Christ comme il s'était approché de celle de Mme Degrâce. Un "-Arrêtez !" résonne du fond de l'église. C'est l'abbé Glaise, la soixantaine et une jambe en bois, qui avance lentement vers Giorgio. Il lui explique que chaque cierge présent est ici pour protéger un enfant ou un mari parti à la guerre. Les familles viennent souvent disposer ces bougies pour que Dieu veille sur eux. Puis Giorgio interroge le prêtre sur la disparition des enfants. Il reste flou sur le sujet et ne semble pas vouloir se mêler à l'histoire. Il ne sait toujours pas réellement ce qui s'est passé ce jour là si ce n'est que Catherine les avait emmené en promenade et qu'elle était revenue toute seule. Elle serait depuis devenue un peu étrange. Son père, le docteur Degrâce, leur aurait effectivement fait une piqûre avant leur départ. En tout cas c'est lui qui a ramené les corps trois jours plus tard, quand ils sont remontés à la surface. Alors que sa femme a sombré dans "une sorte de mélancolie", lui est devenu fou. Il cassait les vitraux de l'église, insultait les femmes du village et fut interné à l'asile de Sainte-Lucie par l'abbé et Marie. Depuis, personne n'a plus eu aucune nouvelle  de lui. L'abbé le croit même mort. Leur conversation est interrompue par la venue d'une petite fille mystérieuse surnommée "Poulette". Elle apporte le courrier des villageoises à l'abbé qui l'envoie aux soldats. Sa récompense est toujours la même : la jambe. "Poulette saute deux fois par dessus la jambe de bois de l'abbé pour la remercier d'avoir apporter le courrier. Après son départ, Giorgio demande où sont enterrés les enfants. L'abbé Glaise l'emmène dans le cimetière qui jouxte l'église. Ils sont au fond, leur douze croix de bois se détachent de l'immense étendue enneigée qui va jusqu'à la lisière de la forêt. Giorgio, seul, se recueille longuement. Il en fera de même vers les marais où il brisera la glace qui a cedé sous les pied des orphelins.

    A son retour à l'auberge, Giorgio rentre les pieds trempés, donne un sucre d'orge à "Poulette" avant de monter dans sa chambre. Il y étudie la carte pour rejoindre l'asile de Sainte-Lucie où il découvrira peut-être le secret de la disparition. Ensuite il a prévu d'aller à Mortemont où il prendra le train pour retourner chez lui, à Paris. C'est alors qu'il entend une dispute provenant de l'extérieur de l'auberge. En regardant par la fenêtre, il aperçoit Catherine Degrâce et deux villageoises se disputant une miche de pain. Catherine , en deuil, est vêtue d'une robe et d'un voile noirs. En descendant, il voit que toutes les"J'ai bien connu les enfants" femmes du village se sont rassemblées entre temps dans la salle de l'auberge. Il sort et rattrape Catherine qui s'apprête à remonter aux côtés de Marie dans la calèche. Elle ne veut visiblement pas lui parler, puis lui supplie de lui demander à voix haute combien elle lui doit pour sa mère. Giorgio obéit puis se voit frappé par Catherine qui riposte : "Non, je ne peux pas vous payer, laisser moi tranquille !" Et elle s'en va avec Marie, lui promettant que jamais elle ne le paierait ! Toute l'arrivée progressive du personnage de Mylène FARMER sur l'écran est par étape. Autant d'étapes qui renfocent son mystère : Sa première apparition (lors du décès de sa mère) est muette. Sa deuxième apparition est invisble. On l'entend de sa chambre sans la voir, alors qu'ici pour la troisième apparition de personnage, on l'entend à moitié car elle chuchote et on ne la voit qu'à moitié aussi car elle porte un voile noir qui lui cache partiellement le visage.)  Giorgio, se rendant pour la première fois réellement compte de la folie latente de Catherine, ne comprend pas. Il décide de partir tout de suite pour Sainte-Lucie. Il en profitera pour raccompagner l'abbé Glaise vers la voiture postale. C'est alors que Giorgio l'interroge sur l'éventuelle peur qu'il aurait des loups. L'abbé Glaise rit : "Il n('y a jamais eu de loups dans la région ! Ce qu'on entend c'est le vent qui souffle contre les pierres de la vallée, ici tout le monde le sait."

    Giorgio part dans sa calèche, sous une neige battante, dans les chemins qui le conduiront à l'asile Sainte-Lucie. En route, perdant son chapeau sous l'effet du vent, Giorgio se retourne, arrête le cheval et aperçoit derrière l'épais rideau de flocons, un enfant d'une dizaine d'années, sur la route qui est debout derrière le chapeau. L'enfant semble handicapé, trisomique. Il ramasse le chapeau de Giorgio et s'en couvre la tête. A l'intérieur du chapeau était contenue sa carte routière. Il préfère reprendre sa route, laissant planer le doute sur ce mystérieux enfant qui est peut-être le fruit de son imagination. Arrivé à" l'asile des aliénés " de Sainte-Lucie l'asile, Giorgio rencontre le professeur Beaumont qui s'avoue incapable de l'aider dans ses recherches. L'asile a connu en 1917 une sorte de mutinerie pendant laquelle les malades se sont mélangés, pendant que d'autres ont fuis. Déçu dans ses vaines recherches, Giorgio décide de les terminer ici. Ce qu'il a vu ici le terrifie. Les aliénés pour leur "guérison", sont enfermés des heures entières dans des baignoires bouchées où ils sont aspergés continuellement d'eau froide. Ce mode d'enfermement a -paraît-il- un avantage : Les fous en ressortent toujours en s'étant esquinté le cou. Cela créé une marque indélébile autour de la gorge (comme celle qu'a la statue de Christ ou celle de la mère de Catherine après s'être pendue) qui permet de les reconnaître. Il repart tout de même en ayant volé les dessins qu'avaient dessinés les enfants avant leur mort. Dessins représentant les loups rodant autour de l'orphelinat.

    Giorgio est de nouveau en calèche sur la route qui mène à Mortemont, où il prendra le train pour regagner Paris. Il doit pour cela retraverser les collines enneigées, les hautes montagnes glaciales. Autant d'épreuves pour sa santé à présent fragile. En haut d'un col, il voit une silhouette se dessiner sur le ciel blanc. Un vieil homme attend, là, silencieux. Giorgio s'arrête et lui demande si ça va. L'homme lui répond qu'il a un peu froid. Le docteur lui proposera rapidement de le rejoindre sur la calèche pour qu'il puisse le ramener chez lui. La nuit tombe et Giorgio ne connaissant pas la région, fait confiance au vieil homme pour lui guider la route. Il lui propose de prendre une soupe chez lui avant qu'il ne rejoigne Mortemont. Sa maison n'est plus très loin... Arrivé à la sortie d'une partie boisée, Giorgio reconnaît la maison du vieil homme : c'est l'orphelinat qui lui fait face. Il fait donc la déduction : le vieil homme est en fait le docteur Degrâce. Reconnu, le docteur Sébastien Degrâce prend les choses en main et active le pas pour rejoindre son foyer et sa fille qu'il n'a pas vu depuis quatre ans. Giorgio, qui est descendu de la calèche, peine à avancer et a de plus en plus de mal à respirer. Il finira par perdre conscience et s'écrouler par terre, laissant se disperser aux quatre vents les précieux dessins des orphelins. noir.

 

    Giorgio se réveille en sueur. Il est dans une chambre de l'orphelinat. Marie est à ses côtés, qui lui recoud un de ses vêtements. Sébastien Degrâce joue du piano au rez-de-chaussée en attendant l'enterrement de sa femme qui aura lieu le lendemain matin. Marie invite Giorgio à dormir. Tel un enfant, il lui demandera tout de même de lui laisser la bougie comme lumière. Mais Giorgio se relèvera quelques heures plus tard, à onze heures précisément. Juste par curiosité, il arpentera le large couloir du premier étage. Il entrouvrira des portes. Il verra Sébastien Degrâce couché dans un cercueil, en train de dialoguer avec son épouse défunte, il verra aussi Catherine, à moitié couchée sur Marie qui lui donne le sein. 

    Le lendemain, c'est l'enterrement de Mme Degrâce. La dépouille est attelée à son cheval. Marie vient le prévenir que le docteur Degrâce ne viendra pas à l'enterrement de sa femme. Les femmes du village l'accueilleraient difficilement. Il ne doit signaler sa présence à personne. Sébastien lui fera quand même des signes enfantins derrière la vitre lors des recueillements. Il ira même jusqu'à faire souffler Giorgio dans une langue-de-belle-mère pendant la minute de silence ! Le cortège arrive lentement devant l'église où sont rassemblées toutes le femmes du village. C'est alors que le cheval qui porte le cercueil se cabre. Héloïse, la plus vieille dit alors que si le seigneur n' en veut pas, c'est signe qu'elle n'est pas morte en bonne chrétienne. Accompagnée de la haineuse Jeannine, elle forcera la faible Josette à révéler ce qu'elle a vu sous le tissu que la défunte avait autour du cou. "-Elle s'est pendue la Degrâce. Hein docteur ?" Catherine, furieuse, s'approche alors des femmes du village (qui disent "attention, voilà la folle") et demande à Héloïse de lui répéter ce qu'elle vient de dire. "-Elle s'est pendue, et c'est à cause de toi". Catherine n'hésite alors pas à lui faire voler par un soufflet la pipe qu'elle tenait entre ses dents. La bouche pleine de sang, elle réplique : " -T'es qu'une pourriture! C'est toi qui les a noyés les gosses. Et c'est ton père qui a payé à ta place. T'es qu'une pauvre folle !". Catherine lui envoie alors un grand coup de pied dans la jambe. Héloïse s'écroule, rattrapée par ses amies dont Jeannine et Harmelle. Catherine se dirige alors vers l'église, et lance aux femmes : "-Alors"-Elle a soufflé les cierges ! Tous les cierges !" ? Vous voulez m'empêcher d'enterrer ma mère ?..." Elle entre alors à l'intérieur, suivie par une femme du village. Héloïse, à terre, fait remarquer que Catherine lui a éclaté une varice. La  femme ressort de l'église et crie : "-Elle a soufflé les cierges ! Tous les cierges ! ". En effet, il ne reste qu'une flamme parmi les bougies qui étaient sensées sauvegarder les hommes du village au combat. Les femmes du villages entrent alors toutes dans l'église et s'acharnent sur la pauvre Catherine que Giorgio retrouvera quelques minutes plus tard en sang. Une mêche de cheveux aura même été arrachée par la cruelle Jeannine. L'abbé, en colère contre les femmes, leur crie de remercier Dieu que leurs maris et leurs enfants n'aient pas été là pour voir ça. Avec tout ce remue-ménage, la tête en plâtre du Christ est alors tombée...

    Giorgio restera seul à l'enterrement de Mme Degrâce après que Marie ait raccompagné Catherine à l'orphelinat. L'abbé Glaise lui conseillera de partir vivement, lui disant qu'il n'a plus rien à faire ici. Il lui dira aussi d'emmener Catherine à Sainte-Lucie. Selon lui, si elle reste les femmes vont la tuer. Il repartira à pied, dans les chemins enneigés, croisant une vision à mi-chemin entre la réalité et l'onirisme : Une très vielle dame vêtue de noir conduit une calèche dans la neige poudreuse. A l'arrière de cette calèche, se trouve l'enfant handicapé que Giorgio avait croisé en allant à Sainte-Lucie. Ils se regardent longuement tandis que la calèche part. Cette seconde apparition de l'enfant "Petit Georges" coïncide avec l'apparition de la très vieille dame au fouet sur la calèche qui symbolise ici la mort. On est ici à l'exacte moitié du film. Il s'était ouvert sur la mort du père d'un enfant et se fermera probablement sur la mort du héros lui même. A ce milieu, la mort ne fait que passer, sans frapper, portant derrière elle cette troublante vision de l'enfance défigurée. De retour à l'orphelinat et assez mal en point, Giorgio se laissera porté par le docteur Degrâce qui lui fera une piqûre et lui racontera en détail sa version de l'histoire quand à la disparition des enfants. Pour lui les loups existent. Même s'il ne dit pas les avoir vus, il croit sa fille dont la légère folie la rapproche un peu de lui. Il est d'un avis contraire à l'abbé Glaise, qui admet la culpabilité de Catherine tout en lui pardonnant. C'est ici que le docteur Degrâce dit : "-Tu sais Giorgino, les hommes sont des enfants" croyant que Giorgio avait une mère qui l'appelait comme ça. Sébastien emmènera son collègue jusqu'à la chambre où il avait disposé les cadavres... celle de Catherine. Ils la  retrouvent endormie. Marie viendra chercher le docteur Degrâce pour le coucher tandis que Giorgio restera là, regarder Catherine dormir. Un bruit de quelque chose de tombé dans l'eau le réveillera toutefois au milieu de la nuit. Il trouve, dans une baignoire, la tête en plâtre du Christ de l'église... Il tentera dès le lendemain matin de replacer la tête sur l'autel ni-vu ni-connu. Mais Raoul, un enfant du village est là qui a tout vu. Giorgio l'aperçoit derrière un pilier, ne sachant pas s'il a a faire à un vrai petit garçon ou au petit Georges, qui hante ses journées dans la région. L'enfant et ses copains l'entraîneront dans le cimetière à côté, où ils regardent les loups au loin depuis un bon moment. Giorgio ne les voit pas. Il ne peut pas les croire. Ce ne sont que des jeux d'enfants... Malgré l'empreinte de patte qui reste sur une tombe des orphelins. A l'arrivée de l'abbé, les enfants fuient en courant. Giorgio en profite pour lui parler de son souhait de partir avec Catherine, pour l'épouser. L'abbé est surpris, demande à réfléchir à cause du deuil avant d'être interrompu par les cloches de la ville, en contre bas. Une femme court sur la route, un sein à l'air, annonçant à tue-tête la signature récente de l'armistice : "-La guerre est finie depuis hier... C'est fini !..."

 

  

    Pour fêter la paix et le retour prochains de leurs maris annoncé par l'abbé, les femmes décident de faire le soir une fête à l'auberge. Elles décident également de pardonner à Catherine, puisque leurs maris et enfant vont revenir et qu'elle les quittera prochainement pour Sainte-Lucie.  Giorgio, pour lui éviter de rentrer à l'asile et aussi parce qu'il l'aime, demande Catherine en mariage devant son père et Marie. "-Pour de vrai ?" répondra Catherine "-Et Marie ? On l'emmènera ? Elle sait faire des enfants Marie ". Lorsqu'ils arrivent dans l'auberge, toutes les femmes du village sont rassemblées et sont joyeusement ivres. Elles font boire Giorgio et Catherine, puis Marie aussi. Harmelle et Jeannine sont très impatientes de voir leur fils et leur mari. Une femme débarque cependant dans l'auberge pour avertir le docteur que l'abbé Glaise est très mal en point. Il ne veut plus laisser entrer personne dans son église. Malgré la nuit tombée, Giorgio va tout de suite le voir. Il ne semble y avoir personne dans l'église, seules sa jambe en bois et une bouteille de vin de messe vide traînent sur un prie-Dieu et par terre. Après plusieurs appels, l'abbé arrive, à cloche- pied. Il est paniqué. Il ordonne à Giorgio de partir immédiatement avec Catherine loin d'ici. Giorgio lui rétorque que les femmes ont pardonné à Catherine le fait qu'elle ait soufflé les cierges. Il dit que les hommes vont revenir mais que ça ne posera aucun problème. Dans un coup de colère et de désespoir, l'abbé lui crie que les hommes sont tous morts. Il l' a appris aujourd'hui et dès que les femmes seront au courant, elles tueront Catherine. Lui a décidé de rester avec elles, et avec son Christ décapité.

"- C'est les loups. C'est pas de ma faute"    Giorgio retourne directement à l'auberge où Catherine a été quelque peu maltraitée par Jeannine et Héloïse. Il l'emmène directement sur sa calèche. En cours de route, Catherine, un peu secouée par la soirée très arrosée des femmes dans l'auberge, interprète mal les intentions de Giorgio qui, croit-elle, l'emporte à Sainte-Lucie pour la faire interner. Elle se met à le frapper, jusqu'à ce qu'elle se jette en dehors de la calèche pour tomber dans la neige et s'enfuir. Giorgio arrête donc les chevaux, saute de la calèche et part à la poursuite de Catherine qui s'enfonce profondément dans les bois.  ll l'a retrouvera en train de piétiner sur un marais gelé afin d'en faire briser la glace; elle qui semble vouloir rejoindre le sort de ces orphelins dont on lui impute la mort. Giorgio, lui, sur le bord du marais, supplie Catherine d'arrêter et lui dit qu'il la croit, que les loups pouvaient bien être présents ce jour là. Elle se calme alors, et se décide à rejoindre le bord où se trouve Giorgino. Mais c'est à ce moment là que la glace commence à se fissurer sous ses pieds... Elle se retrouvera rapidement les jambes dans l'eau glacée, complètement paralysée. Giorgino n'hésitera alors pas à se jeter à l'eau pour la ramener sur la terre ferme.

    Les deux amoureux se serrent alors l'un contre l'autre et se couchent dans la neige en s'embrassant. C'est aussi ici qu'ils se déclarent mutuellement leur amour. Une étreinte commence alors entre Giorgino et Catherine qui, paradoxalement au froid, se dévêtissent. C'est alors là que Catherine, qui découvre pour la première fois l'émoi avec un homme, voit quelque gouttes de sang sur ses doigts. Terrifiées, elle pousse immédiatement Giorgino dans le marais glacé. Puis, à le vision forte du sang sur ses mains superposée à celle de son amant en train de se noyer, elle s'enfui, à toute jambe, entre les arbres de la forêt. Giorgino, lui, s'extirpe avec peine des glaces du marais. Il est frigorifié. Il se redresse petit à petit et commence à marcher, avec ses habits trempés. Mais il est perdu, ne sait pas où aller pour retrouver la calèche sur la route. Il marchera plusieurs minutes jusqu'à ce qu'il entende une petite voix, dans la nuit, entre les arbre : "-Georges ! Faut pas aller dans les bois, il y a des ogres. Georges ? Georges ?" Il voit une petite lumière jaune entre les arbres et s'en approche. Il se retrouve face à face avec le petit garçon qu'il a aperçu déjà plusieurs fois. Il a toujours le chapeau de Giorgino et reste face à lui. Giorgino, toujours incertain de sa réelle présence, lui demande de le lui rendre. Le petit garçon le regarde fixement et commence à pleurer. Puis, au bout d'un certain temps, part en courant. Giorgino, qui lui dit d'attendre, est désespéré, il tentera de sortir de la forêt en marchant encore, jusqu'à ce qu'il tombe évanoui, à cause de la fatigue et du froid.

    Le lendemain, il est retrouvé par des enfants du village qui le traîneront jusqu'à la route en lui attachant une corde autour du cou. Ce seront Héloïse et Jeannine qui, en passant par hasard, ramasseront Giorgino et le raccompagneront à sa chambre de l'auberge pour qu'il s'y fasse soigner. C'est lorsqu'il se réveillera, à l'auberge, qu'il remarquera la profonde trace que lui a laissée la corde dont se sont servis les enfants. Dans le village, on entend au loin des roulements de tambour. Harmelle, l'aubergiste, sort dehors et reconnaît tout de suite au loin Marcel, son fils, tenant par le bras l'abbé. C'est alors la joie, toutes les femmes crient, sortent avec leurs enfants trépignent d'impatience dans l'idée de retrouver enfin leur mari, leurs fils. Derrière l'abbé et Marcel, se trouvent le maire de Mortemont, le tambour, puis des troupes. C'est derrière tout ce cortège que les femmes voient alors une voiture transportant une quinzaine de cercueil. Le désenchantement envahie la population du village, les sourires se figent et les femmes se poussent pour laisser passer le funèbre cortège. Les cercueils sont disposés sur la place du village et on commence à énumérer chacun des soldats du village. Chaque nom est suivi d'un "mort pour la France" prononcé par les quelques soldats présents. Josette ira jusqu'à se jeter sur un cercueil pour l'ouvrir, pleurant de ne pas croire à une telle tragédie. Un  soldat viendra la retenir, lui disant que le contenu n'était pas beau à voir, que là-bas, dans les Balkans, les combattants avaient été mutilés par les loups. C'est ensuite que l'abbé Glaise lit un passage de la bible. Les femmes commencent à l'insulter, à le traiter de menteur, puis le fils GALOPIN lance une pierre sur lui, l'atteignant à l'œil gauche. Le maire de Mortemont, affolé, prend l'initiative d'arrêter là la messe funèbre et de lancer la Marseillaise sur un vieux gramophone. Les femmes excédées, envoient une pierre sur le lecteur de disque qui se pulvérise. Elles disent alors qu'elles vont tuer Catherine, profaner la sépulture de sa mère. Elles partent de ce pas, laissant l'abbé écroulé par terre, en train de saigner. Josette, en colère, lui enverra un dernier coup de pied au visage en lui disant : "-Tu peux te le garder ton Dieu. Sale boiteux !" Giorgino, lui, a tout vu, de la fenêtre de sa chambre. Il se munit de son arme et descend, décidé à sauver Catherine de la colère inmaîtrisable des femmes. L'abbé Glaise lui dit que ce n'est pas la peine, que Marie la emmené à Sainte-Lucie, qu'il est trop tard. Giorgino part vers l'asile de ce pas.

    Il y arrivera la nuit tombée à l'asile. Il demande à voir le professeur Beaumont, qui l'avait bien aidé la dernière fois qu'il était venu. Une infirmière le fait patienter devant la salle des baignoires du quartier des femmes. Là elle remarque la trace noire laissée par la corde des enfants autour du cou de Giorgino. Elle prend aussitôt cette trace pour la marque de reconnaissance des aliénés. Elle fait mine de partir pour aller avertir le professeur. Giorgino entend alors Catherine crier, à l'intérieur de la pièce. Il entre et la voit enfermée dans une baignoire, inondée d'au froide. Un homme la surveille et  explique à Giorgino qu'elle fait sa punition, pour avoir tenter de se pendre. Il lui ordonne alors  de la faire sortir de la baignoire et lui dit qu'il la prend sous sa responsabilité. Après plusieurs réticences, l'infirmier la fait sortir, juste avant l'arrivée du professeur Beaumont accompagné de l'infirmière qui avait accueilli Giorgino et de Maurice, un aide soignant haut et puissant comme une armoire à glace. Le professeur Beaumont, qui se sent trahi par Giorgino, lui dit qu'il doit le faire interner, parce qu'il est malade. Giorgino sort alors son arme et tire sans ménagement dans le genoux du professeur, qui s'écroule en hurlant de douleur. Il menace de le tuer si les infirmiers n'arrêtent pas tout de suite l'eau et ne font pas immédiatement sortir Catherine de la baignoire. Lorsqu'il la soutient sous son bras, Giorgino ordonne à tout le monde d'entrer dans les baignoires, et charge l'infirmier de boucler les couvercles. Une fois cela fait, Giorgino ouvre l'eau au dessus des baignoires et part avec Catherine dans les bras.

    C'est alors une scène d'un grand romantisme qui nous est offert. Giorgino part avec Catherine dans la calèche au milieu de la nuit pour rejoindre l'orphelinat. Elle demandera "-On rentre à la maison ?" Giorgino, lui, dira "-Oui, nous nous cacherons, personne ne nous fera plus jamais de mal, nous serons heureux Catherine, et nous ne mourrons jamais." Ils arrivent tout deux à l'orphelinat qui se trouve être complètement détruit par les femmes du village. Le salon est dévasté, le cheval des Degrâce a été tué et seule Marie est restée. Elle aussi semble avoir été battue par les femmes du village. Elle explique à Giorgino que le maire de Mortemont leur a proposé d'aller travailler à l'usine. Il ne restera personne à Chanteloup. Pendant ce temps, Catherine est montée dans sa chambre, au premier étage. Marie se lève, le regard fixe, s'avance lentement de Giorgino et le supplie de partir, loin. En train de sombrer elle aussi dans sa propre perversité, Marie se met à embrasser Gorgino lentement. Jusqu'au moment où il entend un bruit sourd venant de l'étage. Il a alors compris ce qui venait de se passer. Il jette Marie et court dans les escaliers pour trouver Catherine. Marie, elle, dit : "-Vous savez bien qu'il n'y a jamais eu de loups ici. C'est elle ! C'est elle qui les a tués !". Giorgino entre dans la chambre de Catherine et la trouve pendue à une poutre. Tandis qu'il tente de la réanimer, Marie sort, et sombre en entier dans sa folie. Elle court pied nus dans la neige, sous la pluie, entre le cheval mort étendu par terre et les décombres de l'orphelinat brisé par les femmes. Giorgino, après beaucoup d'efforts, parviendra à ramener Catherine à la vie. 

 

    Le lendemain, alors que les maris des femmes sont enterrés et qu'elles partent avec leurs affaires à Mortemont, Giorgino et Catherine sont dans la forêt en train de chercher le docteur Degrâce, qui s'est enfui dans les marais lors de l'arrivée des femmes. Catherine le trouve, mort, à moitié englouti par le marais, une poignée de sucre d'orge à la main. Il l'attacheront à l'arrière du cheval noir de Giorgino et le traîneront jusqu'au cimetière. Là, il le plongeront dans le caveau familial lui aussi dévasté. Giorgino et Catherine se regarderont alors en se déclarant une dernière fois leur amour. Ils s'assairont sur la tombe et Giorgino dira : 

 

 

 

 

 

"- Catherine ? Je crois que je vais mourir.
-Chut ! Ils sont tout près. Ils sont revenus.
-Les enfants ?
-Non."

 

    Le cheval alors situé derrière eux piétine alors. Il avance jusqu'à l'entrée de l'église, pousse la porte avec son museau et pénètre à l'intérieur. Le vent fait alors claquer la lourde porte derrière lui. Giorgino ne comprend plus très bien ce qui se passe. Il commence à tourner sa tête en arrière pour voir derrière lui. Catherine l'arrête : 

"-Non, ne vous retournez pas. Embrassez-moi."

 

    Après l'avoir embrassé, Giorgino pose la tête sur son épaule et regarde juste devant lui. Un loup gris lui fait face, assis sur une tombe d'un des orphelins. Giorgino, sourit à cette vision, puis ferme lentement les yeux, en expirant pour la dernière fois. Catherine, elle, esquisse un court sourire avant de serrer Giorgino dans ses bras. Au loin, une centaine de loups sortent de la forêt et courent en direction du cimetière où se trouve le couple à moitié mort. Les deux amants restent malgré tout serrés l'un contre l'autre. A l'intérieur de l'église, le cheval noir piétine. Les loups, dehors, se font bruyants. On entend les hurlements tout autour de l'église. Le cheval, paisiblement, s'approche du bénitier, trempe son museau à l'intérieur dans l'eau bénite et, sereinement,  s'en abreuve.

 

Jodel Saint-Marc.

 

FIN

 

 

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