Après cinq ans d'attente tous les clips que Laurent BOUTONNAT
a tourné pour Mylène FARMER sont réunis sur un DVD qui
est sorti le 13 mars 2001. Maman à Tort n'était sorti qu'une
fois dans la cassette de 1987 (en son mono) et les clips d'Allan et Plus
Grandir Live sur la compilation sortie en 1989. Ils sont tous réunis et on
peut enfin déchiffrer les noms du générique de Désenchantée en
grande définition !
Toutefois, malgré les menus animés et le 16/9e anamorphique, le son des clips ne reste qu'en stéréo. Après un premier remixage du mono d'origine de Plus Grandir, Libertine et Tristana en stéréo pour la sortie des Music Vidéos I en 1997, un nouveau codage en Dolby Surround Digital 5.1 n'est pas présent... :-( On a droit au même son que pour le Live à Bercy. Ce qui n'est déjà pas si mal car le seul son digital pour les films de Laurent datent du support Vidéo Disc à la pochette noire. En revanche, ce qui semble inacceptable, c'est que le concert de 1989 ne sort toujours pas en DVD. Le film a pourtant été numérisé et sorti en 1997 en vidéo Disc en même temps que les Music Videos... Quand à Giorgino, il semble être entièrement dans les oubliettes boutonniennes.
On peut toutefois noter sur le bonus du DVD Music Videos II & III "M.F. Confidential" que Laurent Boutonnat est présent en train de faire les arrangements de l'album Anamorphosée. Ce sont à ce jour les seules images prises de lui en train de composer. Prochainement nous publieront ici un résumé de cette séquence. Le DVD est parfait techniquement et donc indispensable, surtout après presque un an d'attente.
PLUS GRANDIR
Premier clip tourné en 2.35 cinémascope. D’emblée, l’ambiance est donnée
par le lieu de tournage : un cimetière dans lequel Mylène y découvre sa
tombe. Elle n’est pas encore teinte en rousse mais l’imagerie du tandem
Boutonnat/Farmer est déjà là. Mort, sexe, religion feront interdire ce clip
de diffusion télé. Quant à l’image, c’est le presque parfait : la définition
est remarquable, tout comme les contrastes qui mettent en valeur les jeux de
lumières claires et obscures des scènes d’intérieur. Seule la compression
vacille par moment mais rien de gênant.
LIBERTINE
Le clip qui lança Mylène Farmer tout autant que la chanson. L’esthétisme
est un hommage au Barry Lindon de Stanley Kubrick. Mylène est devenue rousse et
joue nue pour la première fois (et pas la dernière). Les tons ocres passent à
merveille. Seule une légère granulation apparaît de ci de là ainsi que de très
rares griffures de pellicule. Les fumées du prologue passent sans aucun problème.
POURVU QU’ELLES SOIENT DOUCES
Ou Libertine 2. Judicieusement placé derrière Libertine alors que le
clip à été tourné 2 ans plus tard. On passera donc le changement de coupe de
cheveux de Mylène pour se rappeler que ce clip entièrement financé par le
tandem Boutonnat/Farmer fût le plus cher de l’industrie musicale française.
Et cela se voit à l’écran par le nombre de figurants et les costumes entre
autres. Les tons ocres sont toujours là, par contre la définition est en
retrait : Les gros plans sont légèrement flous. Mais ça n’est pas dû au
DVD puisque toutes les autres éditions vidéos ont toujours présentées le défaut.
TRISTANA
Laurent Boutonnat revisite Blanche Neige. Pas la peine de vous dire que
la fin n’est pas celle de Disney. Couleurs et contrastes sont toujours au top.
Par contre la compression nous offre quelques plans saccadés et de la
granulation de temps à autres.
SANS CONTREFAÇON
Tourné avant POURVU QU’ ELLES SOIENT DOUCES le clip présente les mêmes
caractéristiques et les mêmes défauts, à savoir le type de pellicule utilisée
qui donne en vidéo une définition plus faible (regardez les lattes de bois des
roulottes du cirque qui présentent des marches d’escalier dès que la caméra
bouge). A noter que Mylène rit vraiment dans ce clip pour la première fois.
AINSI SOIT JE
Peut être le plus beau clip parce que le plus simple de Laurent
Boutonnat même s’il y garde ses nombreux effets de style comme les nombreux
ralentis ou son symbolisme avec l’apparition de la biche. Mêmes remarques
techniques que pour SANS CONTREFACON. La compression quant à elle reproduit à
merveille la neige et la fumée.
SANS LOGIQUE
Les amours impossibles, toujours. La granulation se réveille mais le réducteur
de bruit vidéo veille, donc rien de bien grave.
A QUOI JE SERS
Écrite pendant la tournée de 1989, un soir de blues (ce qu’on pense
assez rare chez Mylène Farmer). L’artiste y retrouve au fil de l’eau tous
les protagonistes de ces clips. Ici la granulation est voulue. Nous nous
attarderons donc sur les superbes contrastes de ce clip en noir et blanc. Ici
aussi les fumées passent sans problème le cap de la compression MPEG2.
DÉSENCHANTÉE
L' Imagerie de Laurent Boutonnat avec un I majuscule et le plus grand
succès de Mylène Farmer. L'image est la plus belle de tout le DVD et ça n'est
pas un mince compliment. Les éclairages difficiles des scènes d'intérieure
font merveille. Les couleurs sont magnifiques.
REGRETS duo avec Jean Louis
Murat.
Deuxième clip en noir et blanc et retour au décor d'origine, c'est à
dire le cimetière. Les plans surexposés et la fumée passent toujours à
merveille. Par contre les fondus d'image sont un peu saccadés par la
compression.
JE T' AIME MELANCOLIE
Tourné en 1.66/1 comme BEYOND MY CONTROL et
A QUOI JE SERS. Ce sont donc
les seuls clips légèrement recadrés pour le 16/9. Ce clip est un peu
granuleux mais le noir fait ressortir à merveille les tenues de danse et de
combat.
BEYOND MY CONTROL
Dernier clip signé Laurent Boutonnat qui se présente presque comme une
conclusion de toutes les amours impossibles de Mylène Farmer qu'il a filmé en
8 ans. Lui aussi interdit de passage avant 22 heures à la télé. La
granulation est plus importante sans être dérangeante.
LE
SON est globalement très bon. Il a aussi été remixé en 1998 et
supervisé par Laurent Boutonnat. Néanmoins les premiers clips présentent une
dynamique plus faible. Il faut attendre A QUOI JE SERS pour réveiller les
enceintes. Ne croyez pas pour autant que les premiers clips soient mauvais, on
passe seulement du très bon à l'excellent.
On peut cependant regretter l'absence de remix Dolby Digital 5.1.
L'
INTERACTIVITE : Le menu principal est légèrement animé sur fond
d'images extraites de Ainsi soit-je et de neige. Il
donne accès
- A l'intégrale des clips qui comme son nom l'indique permet de regarder
l'ensemble des clips
- Aux clips par chapitre animé
- Au Making of de Pourvu Qu'elles soient Douces et de Désenchantée déjà présents sur les anciennes éditions vidéos. Nettement moyens en qualité
technique, ils sont néanmoins très complets. Attention, ils ne comportent pas
d'interview
- A 3 clips rejetés des autres éditions Music Videos . A savoir
Maman à tort (première chanson de Mylène Farmer ) très sombre et peu défini
; Allan et Plus Grandir extraits de la tournée de 1989.
Rémy Coquin.
-Généralités : 5/5. C'est parfait ! La jaquette est claire et bien détaillée, le livret comporte tous les détails importants et des photos sublimes. Les menus entièrement animés et sonorisés sont superbes et exploitent à merveille les éléments graphiques que l'on peut retrouver dans les clips
-Suppléments : 5/5. On distingue
ici deux sortes de suppléments : les clips-bonus et les making-of.
Les clips-bonus sont des clips qui avaient été écartés lors de la réédition
des premières VHS. Il s'agit de "Maman à tort" (effectivement
loin de la qualité globale) et les versions live 89 de "Allan"
et "Plus grandir" qui offrent tout de même quelques images inédites
en plus des extraits live.
Les making-of sont ceux de "Pourvu qu'elles soient douces" et
"Désenchantée", deux clips mastodontes à la lourde
production dont ces making-of donnent un (trop) léger aperçu. Mais c'est
surtout l'occasion pour les fans de voir le couple Farmer/Boutonnat au travail.
-Image : 4,5/5. Incroyable ! Ce DVD est rempli de prouesses et d'initiatives très appréciables au niveau de l'image. Une remastérisation complète a tout d'abord été effectuée à partir des négatifs originaux. Ensuite, le choix a été fait d'encoder le tout en anamorphique. C'est excellent ! Les possesseurs de TV 16/9ème vont s'en donner à cœur joie ! Surtout que la compression est elle aussi un véritable tour de force si l'on considère l'omniprésence de fumées et autres brumes dans quasiment tous les clips. Et le résultat est étonnant de stabilité ! Les arrières plans n'ont pas la bougeotte et aucun pixel à déplorer. Du très bon travail !
-Son : 5/5. Le PCM stéréo est de très bonne qualité. Très dynamique, et laissant tout de même toute la place nécessaire aux sons plus fins comme les bruitages de "Libertine" ou "Pourvu...".
Testé avec : Téléviseur 16/9 Sony 16/9 70 cm, Lecteur DVD de salon Pioneer DV-626D Amplificateur Yamaha RX-V393RDS, kit enceintes & caisson Yamaha NSP-300
Vous le savez peut-être maintenant, mais la rédaction
de Dvdfr.com abrite une bête curieuse : un fan de Mylène Farmer ! Chantre de la liberté d'expression, Dvdfr.com se lache et accorde plusieurs
pages pour la présentation et l'interprétation (très personnelle) des 28
clips composants les 2 DVD sortis récemment.
MAMAN A TORT
C'est là que tout à commencé. Dès la première
chanson, dès les premières notes de cette chanson entêtante. Le succès est déjà
là, la controverse également.
Mais qui est cette chanteuse qui se permet en 1984 de raconter des trucs pareils
sur les ondes radio françaises ? Maman à tort ? J'aime l'infirmière ? J'aime
ce qu'on m'interdit ? Et bien ça promet !
Le clip n'est pas des plus significatifs (loin de là). Plus une blague de
potache surtout destiné à jeter de l'huile sur le feu allumé par les premiers
détracteurs de l'époque.
Un peu de morbide et d'humour noir et le tour est joué. On a qu'à bien se
tenir, Mylène Farmer et Laurent Boutonnat sont lâchés dans la nature et il
semblerait qu'ils ne soient pas décidés à se laisser impressionner.
Pour l'anecdote, sachez qu'un clip plus "sérieux" était prévu et
avait même été storyboardé. Mais le budget de l'écurie Farmer, ne
permettait pas encore de s'offrir du cinéma.
Fort heureusement, le succès de ce premier single a ouvert la voie pour la
suite...
PLUS GRANDIR
Cette fois, ça y est : la chanson est plus sage que la
première, mais le clip est un véritable court métrage. Musique d'intro (le
morceau Cendres de Lune), générique, format cinémascope, et re-générique
à la fin avec musique composée spécialement pour l'occasion.
La grande période "Boutonnesque" est lancée.
Mais ce sont également les thèmes chers à Mylène Farmer qui s'amorcent ici :
le vieillissement, la mort, les rapports conflictuels et toutes une floppée de
paradoxes en tout genre...
Ce texte et le clip qui va avec s'attardent surtout sur le vieillissement inévitable.
Mais ce n'est pas tant le vieillissement physique qui inquiète ici mais bien le
fait que ce vieillissement inéluctable amène aussi son lot de changements dans
la vie d'une personne. Elle ne veut pas grandir parce qu'elle ne veut pas
souffrir et encore moins mourir. Et Histoire d'exorciser cette peur, du conflit
avec sa poupée jusqu'à sa mort en passant par le viol, le clip présente tout
ce que le fait de grandir peut amener de négatif : le fait de changer, de
devenir un objet sexuel et bien évidemment de finir ses jours dans une
enveloppe charnel totalement inutile. En clair, Mylène n'est pas pressée de
passer au stade de Femme.
LIBERTINE
Et pourtant ! Elle a des charmes et sait en user ! Elle
va même jusqu'à proclamer (pour la chanson) qu'elle est offerte à qui veut.
Ce nouveau titre va amorcer une série (longue et ininterrompue à ce jour) de
tubes auprès du public français (même les réfractaires connaissent et ne
peuvent s'empêcher de fredonner en l'entendant). La provocation est à son
maximum (pour l'époque) ! Je suis une catin ! Manquait plus que ça !
Mais c'est également l'occasion pour Laurent Boutonnat de faire preuve une
bonne fois pour toute de son talent de réalisateur et de metteur en scène
(non, non, ce n'est pas tout à fait la même chose). On ne parle d'ailleurs
plus de clip mais de court métrage ! Il faut dire que tout y est ! Cinémascope,
décors, costumes, ambiance bacchanalesque, duels, intrigue, sexe... pour un
peu, on se croirait dans Barry Lyndon !
L'interprétation n'est pas forcément de mise avec ce "film" étant
donné qu'il illustre parfaitement un texte plutôt léger. Par contre, ce fut là
la première occasion pour la censure de tomber à bras raccourcis sur Mylène
Farmer et Laurent Boutonnat. Malgré les scènes de duels et d'exécution
sommaire (dans le dos), c'est surtout la scène (très belle et très sensuelle
d'ailleurs) de "sexe" plantée au beau milieu. Ben oui, la foufoune de
Mylène aux heures de grande écoute, c'est pas bien ! Alors on coupe ! Et à
moins d'avoir eu la chance d'assister à la projection intégrale du film dans
un cinéma des Champs-Elysées (sacré promo pour l'époque), il aura fallu
attendre la première cassette de clips (1987) pour enfin visionner l'intégralité
de la chose, qui depuis ne ferait d'ailleurs plus peur au plus vertueux comité de censure.
On va dire que j'en fait des caisses sur Laurent Boutonnat, mais saluons également
avec ce clip ses premières compositions (hors musique de la chanson) pour
accompagner certains segments du film. Et oui, pour un clip tourné comme un
film, il fallait bien une musique de film (qui fit d'ailleurs l'objet d'une édition
en maxi 45 tours).
TRISTANA
Dans cette adaptation de Blanche Neige et les sept nains
transposées en Russie en pleine révolution, on passe ici dans un univers de
conte poétique mais néanmoins morbide. Tristana est très belle et cela ne
plait guère à la reine du coin qui ordonne la mort et le dépeçage de la
belle... De nouveau, la mort occupe ici une grande place et est considéré ici
comme une éventuelle porte vers la délivrance d'un monde trop instable.
"Laissez-la partir, laissez-la mourir", on peut difficilement être
plus clair ! Surtout quand on apprend que "la" c'est
"elle"... De plus la conclusion du clip ne laisse guère le choix de
l'interprétation quand, à la question "es-tu vivante ou morte",
Rasoukine s'entend (mais l'entend-t-il vraiment) répondre "je ne sais
pas" par une Tristana qui célèbre sa renaissance en pleine steppe enneigée
et néanmoins ensoleillée, une sorte de havre de paix immaculé où l'insouciance
est de mise. Et pourtant, là où Blanche Neige revenait à la vie pour qu'ils
"vivent heureux en ayant beaucoup d'enfants", Tristana ne revient pas
malgré le retour de son "prince charmant". Un exemple (et il y en
aura d'autres) d'amour contrarié et de paradoxe entre amour et souffrance chez
Mylène.
SANS CONTREFAÇON
1987, un nouvel album approche à grands pas. Et pour
l'annoncer, voici "Sans contrefaçon". Un nouveau chef d'oeuvre
d'ambiguïté. Le clip est une merveille. Il s'agit encore d'un amour contrarié,
mais quel traitement ! Est-ce le mythe de Pinocchio appliqué ici à l'objet de
nos digressions ? Est-ce l'étrange pouvoir de cette femme (incarné par la très
rare Zouc) ? Sont-ce les brumes qui habillent à merveilles ces dunes et cette
plage interminable ? Peut-être est-ce tout cela, mais il se dégage de ce clip
une émotion rare dans la filmographie de notre couple infernal. Ce satané
paradoxe est invivable ! Cet homme qui voit sa créature prendre vie et tomber
instantanément amoureuse de lui et qui la perd dans la minute qui suit...
Comment ne pas avoir le coeur serré pour lui ?
On comprend encore un peu mieux ici ce qui anime les amours de Mylène. Car sous
couvert du texte qui cultive le thème de l'être androgyne, le clip quant à
lui, peut très bien faire état du paradoxe bien connu de notre fée rousse qui
a (avait) tendance à rejeter les hommes dont elle tombe amoureuse. Cet amour
contrarié n'est pas forcément celui du marionnettiste mais bel et bien celui
de Mylène qui choisi le mutisme après avoir avouer son amour, alors qu'elle
sait qu'elle va faire souffrir (volontairement) cet homme. Pour reprendre une
phrase qui reviendra bien plus tard : "c'est pas facile, le
plaisir"...
AINSI SOIT JE
Et ce n'est pas "Ainsi soit je..." qui va
arranger les choses.
1988, le nouvel album (du même nom), sort enfin accompagné de ce single.
Cette fois, le clip s'écarte du côté cinéma pour revenir à une illustration
plus métaphorique du texte. Encore une fois, l'amour ne triomphera pas. Il est
pourtant bien présent, palpable dans le texte, il a l'air pur. Mais lui céder,
c'est céder sa place à quelqu'un d'autre dans son propre esprit et pour ça,
ce n'est pas encore le moment. Le clip va encore plus loin. Car au bout de 5
minutes de poésie monochrome (lune, biche, chouette, neige, balançoire, corps
offert) la belle fini tout de même par se noyer (volontairement ?). Comme une
fatalité, elle égrène son "ainsi soit je", déclare que tout est
noir et qu'elle ne voit pas quel espoir il pourrait y avoir...
Tant pis...
POURVU QU'ELLES SOIENT DOUCES
Pour la première et unique fois dans l'histoire du clip
français, non seulement on dépasse ici le quart d'heure de film, mais en plus,
sous couvert d'un texte qui fait la part belle à l'indécision sexuelle et donc
sans grand rapport avec "Libertine", ce clip va se positionner comme
une suite cinématographique de ce dernier.
On retrouve donc Libertine et son amant où on les avait laissé 2 ans plus tôt,
c'est à dire pour mort, tandis qu'un bataillon d'anglais cherche un raccourci
que jamais ils ne trouva. Mais les records pleuvent sur ce titre : 17 minutes,
13 semaines en tête du Top 50 de l'époque, un budget sans précédent pour un
"clip vidéo"... Mylène avouera à l'époque qu'elle était prête à
manger des nouilles pendant un moment si elle et Laurent Boutonnat pouvaient se
faire plaisir de la sorte. Et le travail est conséquent ! Jugez plutôt : en
toile de fond, le conflit anglais/français, les prostituées engagées pour
distraire les anglais tandis que les français approchent, les vieux comptes à régler
entre Libertine et sa rivale, et on peut au final se poser des questions
sur la nature exacte de Libertine. Ne serait-elle pas un ange mortel venu sur
Terre pour y prendre quelques vies ? Car enfin, que de morts autour d'elle !
Jusqu'à ce tambour qui en la voyant se rappelle des conseils de son père qui
l'avait prévenu sur l'apparence que prendrait la mort au moment où elle
viendrait le chercher. Et pourtant, il n'est pas mort, car devenu vieux, c'est
lui qui nous narre cette histoire. Notre ange a-t-il eu pitié de lui ? Etait-il
assez innocent pour mériter de survivre à ce carnage ?
Mais c'est déjà la fin et le générique se déroule avec la musique qui
devint le magnifique "Puisque..." une fois accompagné de son texte
sur la face B du 45 tours.
SANS LOGIQUE
Pour la population "bien pensante", Mylène
Farmer était déjà morbide, sexuellement instable et perturbée... histoire de
ne pas les décevoir, elle ajoute ici le satanisme à sa collection de
psychose...
Cette fois, elle annonce clairement la couleur : "aussi bien satanique
qu'angélique"...
Et le clip ajoute en plus un nouvel amour contrarié, quand possédée par le démon,
Mylène embroche son amant pendant un simulacre de corrida. Mais c'est plus fort
qu'elle, même amoureuse, "une autre" en elle se glisse. Elle avoue au
moins que tout cela n'a rien de logique. Mais le mal est fait, son amant se
meurt, la pluie tombe et la belle pleure des larmes de sang... sans doute son âme
déchirée qui se manifeste...
A QUOI JE SERS...
Cette chanson est née pendant la tournée de 1989. Les
premières dates n'ont pas eu cette chanson sur scène. On atteint ici un summum
de mélancolie dans la carrière de Mylène Farmer.
La pochette du disque est une photo prise dans sa loge à la fin d'un concert.
Elle est effondrée. Cette première tournée fut quelque chose de très violent
pour elle. Une émotion sans précédent (émise par son public en transe) la
submergeait tous les soirs. Difficile de recevoir ça sans broncher. Les larmes
étaient présentes tous les soirs. Et là, après avoir reçu autant d'amour et
de témoignage d'affection, tout s'arrête brutalement, tous les soirs. La
question vient alors : "mais à quoi je sers ?"...
Quel est son rôle exact dans cet échange ? Doit-elle donner moins ? Doit-elle
donner plus ? Comment trouver l'équilibre dans cette mer déchaînée ?
"A quoi bon vivre..." se questionne-t-elle ... et le clip donne une réponse
pour le moins pessimiste : le suicide. Car comment interpréter autrement sa résignation
évidente. Elle a préparé sa valise, elle attend calmement le
"passeur" et retrouve dans des marais monochromes les personnages avec
qui elle a débuté sa carrière, une façon de revoir sa vie d'artiste en un
instant. Mais peut-être que le tableau n'est pas si noir... peut-être qu'une
renaissance est possible... En tout cas, à l'époque, nombreux sont les fans
qui se sont demandé si la carrière de l'ange roux ne se terminait pas ici.
ALLAN
1989 fut pour les fans des deux premiers albums une année
fabuleuse : celle de la première tournée. Les critiques furent également époustouflés
par la qualité du spectacle proposé : danseurs, décors grandiose, costumes
différents signés Mugler pour chaque performance... C'est également
l'occasion de vendre quelques temps après un double album Live lancé par ce
single écrit en hommage à Edgar 'Allan' Poe et qui figurait déjà sur l'album
"Ainsi soit je...".
Et qui dit single dit toujours clip, et là, Laurent Boutonnat ne peut se
contenter de mettre bout à bout quelques images du concert (qu'il a d'ailleurs
filmé sur pellicule). Alors il filme la destruction par les flammes du décor
du concert. C'est le moine qui ouvrait et fermait la grille du concert qui est
chargé de la sale besogne avec un lance-flammes. Mylène assiste alors à
l'effondrement de ce symbole. Mais n'est-ce pas là une sorte d'exorcisme ? Une
ultime solution pour oublier cette immense joie et à la fois cette immense
souffrance que lui a apporté cette tournée... Elle semble en tout cas sereine
et ne semble pas regretter cette folie...
PLUS GRANDIR LIVE
Deuxième extrait du Live 89, cette reprise de "Plus grandir" sert surtout de deuxième tremplin promotionnel au CD. Le clip lui même ne comporte quasiment aucune mise en scène supplémentaire et se contente de mixer les images des différents morceaux du concert. Une grosse bande-annonce en quelque sorte, pour annoncer la sortie de la cassette vidéo...
DÉSENCHANTEE
Deux ans d'attente, et voici "L'autre...".
Ce nouvel album est le commencement d'un profond changement dans la personnalité
et les textes de Mylène Farmer. La voix a changé, la coupe de cheveux aussi et
au lieu d'exposer ses névroses, elle choisi de parler de ce qui l'anime et de
ce qu'elle ressent. Avec ce single, elle entraîne avec elle toute un nouveau
groupe de fans qui vont se reconnaître dans cette déclaration de désenchantement.
Elle se défend pourtant d'avoir voulu lancer un hymne pour la jeune génération
de l'époque... trop tard ! Le succès est au rendez-vous. La tourmente aussi
dans son esprit. "Plus rien ne va", "tout est chaos...",
c'est également le cas de ce clip où dès son arrivée dans un camp de travail
perdu au milieu de nulle part, Mylène déclenche une révolte qui permet à ses
participants de s'échapper et de courir alors vers la liberté... mais où
est-elle justement cette liberté ? Devant eux, tout n'est que neige et glace...
Mais il vaut certainement mieux avancer dans cet inconnu au risque de se perdre
et peut-être d'y rester, plutôt que de retourner en arrière et de rester
prisonnier de cette vie sans aucun sens.
REGRETS
Fait unique dans la carrière studio de Mylène Farmer :
un duo (un autre sera fait plus tard, mais sur scène). Et tant qu'à faire,
autant trouver quelqu'un dont l'aura est tout aussi sombre à l'époque.
Jean-Louis Murat est cet homme. Lunatique, mystérieux, ce sont ses premiers
textes totalement introuvables aujourd'hui qui ont intrigué Mylène. Ils se
rencontrent et il accepte (il se demandera plus tard pourquoi) non seulement de
chanter sur le nouvel album, mais également d'assurer une partie de la
promotion du single. Assez curieusement, en lisant le texte, on se dit que cette
chanson est plutôt optimiste. Un amour enfin permis ? Il est même plutôt
fougueux ! "Oh viens ne sois plus sage", "n'aie pas de
regret", et toutes sortes d'invitations à tenter la chance d'un amour, même
s'il reste incertain. Le clip, lui, présente une approche très romantique mais
bien plus pessimiste quand on comprend que cet homme vient ici penser à son
amour perdu mais qui reste toujours très vivant dans son esprit au point
d'avoir l'impression l'espace d'un instant qu'il l'entend, la voit et la
touche... superbe.
JE T'AIME MELANCOLIE
Reine du paradoxe, Mylène nous parle ici de son amour
pour les sentiments triste et pour la mélancolie en particulier. Mais elle le
fait sur un ton léger grâce à une musique entraînante qui fera de ce titre
un nouveau succès. Cependant, sans suivre tout à fait le texte, le clip choisi
d'être plus ouvert en offrant un combat de boxe mêlé à des chorégraphies exécutées
sur le ring en petite tenue signée Gaultier. Que représente vraiment cet homme
? La mélancolie, certaines peurs, ou plus simplement un défouloir ? Ce qui est
certain, c'est que Mylène sort victorieuse de ce combat. Mais paradoxalement,
cela ne semble pas la satisfaire puisqu'elle s'effondre douloureusement à
genoux sur le ring dans une posture de découragement... d'autres combats
s'annoncent certainement et ils risquent d'être plus rudes...
Stéphane Leblanc.