scénario 1

Reproduction exacte du scénario original du film écrit de la main même de Laurent Boutonnat et de Gilles Laurent dans la dernière version écrite du 26 juillet 1992. 184 pages. Son présentes toutes les scènes finalement non-tournées, ou supprimées au montage, qui faisaient de Giorgino un film de 4 heures. Est présent aussi le style indéniable de Boutonnat pour décrire ses personnages, ses décors, ses atmosphères.

en blanc : scènes, phrases, mots et plans supprimées au montage

souligné ET italique : commentaires et annotations de Jodel (le webmaster)

Giorgino
(titre provisoire)
1 INT,          JOUR          HÔPITAL            UN LONG COULOIR 
(Octobre 1918) 
Un enfant d'une dizaine d'années est assis sur un banc, le visage tourné vers nous. Il porte béret, pèlerine, culotte courte et gros souliers. L'air à la fois timide et complice, il bat des jambes sous le banc et baisse parfois les yeux en se grattant la tête avant de ramener son regard vers nous. Au loin, des bruits de voix, des gémissements, des pas qui résonnent entre les murs du vieil hôpital. 
Un bruit de pas se rapproche .... .... l'enfant tourne la tête: 
Une jeune religieuse vient de s'arrêter à côté de l'enfant. Elle lui tend la main et lui sourit gentiment:
  
LA RELIGIEUSE (à 1'enfan)
Giorgio Volli, vous me suivez ...
UN HOMME (off) Euh ... Ma sœur, Giorgio Volli, c'est moi.
  
Surprise, la religieuse tourne la tête vers l'homme:
 
Assis sur un autre banc, juste en face de l'enfant, Giorgio Volli porte l'uniforme. Il a une trentaine d'années, un visage fatigué, des joues mal rasées, mais son regard triste a quelque chose d'enfantin.
La religieuse étouffe un rire gêné.
  
LA RELIGIEUSE (rougissante) Oh, pardon mon lieutenant! Vous voulez bien me suivre...
Giorgio se lève et suit la bonne sœur, non sans avoir échangé un dernier petit signe complice avec l'enfant. 
Alors qu'ils longent le couloir, la religieuse et Giorgio croisent entre autres blessés, un soldat couvert de sang poussé sur un chariot. Dans le lointain, le sourd tonnement d'un canon.
cette partie était initialement présente après l'apparition du Docteur de la scène suivante.

 2 INT. JOUR/ HÔPITAL                      BUREAU DU DOCTEUR JQDEL

Au mur, une affiche représente un soldat français agenouillé, les mains jointes, les yeux tournés vers le ciel, cerné par une meute de loups noirs et menaçants. Sur l'affiche, on lit ces quelques mots: Poilu, Rien n'est perdu, Face à la barbarie, Tourne-toi vers Dieu et prie!"

Au bas de l'affiche:
"Les secouristes de Dieu,
20, rue de Rochechouart,
Paris 9ème"
 
Giorgio contemple cette affiche en déboutonnant lentement la veste de son uniforme.  
DOCTEUR JODEL (off) Quatre ans de guerre mais ... quatre ans de travaux pratiques!
 
Nous découvrons le docteur Jodel, un homme d'une soixantaine d'années, aux cheveux grisonnants, portant lunettes, une blouse blanche ouverte sur sa tenue militaire ...
 
DOCTEUR JODEL
  Ce que je vais vous dire est peut-être horrible, mais je ne pense pas qu'un jeune médecin comme vous pouvait rêver d'une meilleure école... Vous avez peur de la mort, Volli ?
Giorgio détourne son regard de l'affiche et fixe Jodel:
GIORGIO
... oui.
 
DOCTEUR JODEL
Asseyez-vous.
Giorgio s'asseoit. Jodel contourne son bureau et, muni d'un stéthoscope, se dirige vers Giorgio.

DOCTEUR JODEL (redressant la tête) La fondation Roux ... Mais dites Moi, c'est pas une maison pour les petits anormaux ça? ... Non... ?

GIORGIO (rectifiant) Pour des enfants différents, souvent  trop sensibles ...

DOCTEUR JODEL (rebouchant son stylo) oui, enfin... si les parents les abandonnent à un institut, c'est tout de même qu'ils ont de bonnes raisons! ... (se levant:) Et les piqûres, vous continuez les piqûres?

GIORGIO oui, bien sûr.

DOCTEUR JODEL Bravo! Je le dis toujours: 50% de médecine, 50% de foi, et on fait un miraculé!

Jodel se dirige vers une petite table roulante sur laquelle est installé un appareil de mesure de capacité respiratoire: un cylindre de verre gradué d'où s'échappe un tuyau de caoutchouc muni d'un embout.

Jodel pousse lentement la table vers Giorgio, tout en déclamant sans hausser la voix:

DOCTEUR JODEL ..."Quand je le vis, je tombais à ses pieds, comme mort. Il posa sur moi sa main droite en disant: Ne crains point! Je suis le premier et le dernier, et le vivant. J'étais mort; et voici, je suis vivant ...

Ayant fait roulé l'appareil jusque devant Giorgio, Jodel se saisit, sur son bureau, d'un verre rempli d'absinthe. Il le lève en direction de son interlocuteur, tout en concluant sa phrase:

DOCTEUR JODEL ... au siècle des siècles.

Il boit cul-sec, repose son verre et s'essuie la bouche d'un revers de main ...

DOCTEUR JODEL Mais attention, Volli: pas de surmenage Et avec l'approche de l'hiver, pas de coup de froid! ...

Jodel désigne l'affiche du poilu entouré de loups que Giorgio regardait:

DOCTEUR JODEL Sinon, vous finirez dans la gueule du loup!

Jodel rit. on frappe à la porte.

DOCTEUR JODEL (agacé) Oui mettant sa main en cornet devant sa bouche, Jodel fait signe à Giorgio de souffler dans l'appareil de mesure:

DOCTEUR JODEL(à Giorgio) Allez-y!

La porte s'ouvre sur un infirmier qui vient apporter un dossier à Jodel.

L'INFIRMIER (à Jodel) Dumoulin, Docteur ... arrêt cardiaque pendant l'amputation.

Jodel s'empare du dossier de l'infirmier et le jette machinalement sur son bureau. voyant que l'infirmier ne quitte pas la pièce, iode! s'impatiente:

DOCTEUR JODEL (à 1'infirmier) Oui? Eh bien?

L'INFIRMIER (embarrassé) C'est que ... Il y a son petit qui l'attend dans le couloir...

DOCTEUR JODEL(subitement très intéressé) Ah? Depuis quand?

L'INFIRMIER Depuis ce matin.

Giorgio, visiblement touché par cette nouvelle, regarde en direction des deux hommes.

DOCTEUR JODEL (subitement très agacé, à l'infirmier) C'est pas mon boulot, mon vieux ! Voyez ça avec une bonne sœur ...

Croisant le regard de Giorgio, Jodel s'interrompt pour lui faire à nouveau signe de souffler dans l'appareil. Puis il reprend:

DOCTEUR JODEL (à l'infirmier) ... Vous n'avez qu'à prendre la grosse, là, celle qui a des gros...

Il mime une poitrine opulente puis chasse l'infirmier d'un revers de main. L'infirmier sort.

DOCTEUR JODEL (à Giorgio) Eh ben soufflez!

Giorgio porte le tuyau à sa bouche et souffle avec insistance. mais, dans le cylindre de verre, la jauge ne s'élève pas. Giorgio recommence à plusieurs reprises, rougissant sous l'effort. 

DOCTEUR JODEL (pensif) Qu'est-ce qu'on disait? Ah, oui ... maintenant que l'armée vous libère, il va falloir que vous preniez l'air, mon vieux, et pas n importe lequel! Vous avez de la famille, quelqu'un qui vous attend, une ... (l'oeil grivois:) une petite femme ... ?!

GIORGIO (souriant timidement) Non... Je vais reprendre mon travail auprès des enfants, à la fondation...

DOCTEUR JODEL (fronçant les sourcils) Pourquoi vous ne voulez pas souffler?

GIORGIO J'ai soufflé ...

DOCTEUR JODEL (incrédule) Recommencez pour voir ...

Giorgio souffle à nouveau. La jauge ne s'élève toujours pas dans le cylindre.

DOCTEUR JODEL (intrigué) C'est pas possible que vous ayez si peu de souffle! Donnez-moi ça!

Jodel arrache le tuyau des mains de Giorgio et souffle à son tour de toutes ses forces dans l'embout: Dans un curieux bruit de sifflet, la jauge s'élève à peine d'un centimètre. Jodel jette le tuyau, retourne derrière son bureau et, se saisissant d'un tampon ...

DOCTEUR JODEL (agacé) oui ben... Il vous restera bien assez de poumon pour respirer encore quelque temps!

Jodel imbibe le tampon sur un encreur et en frappe violemment un formulaire ...

3 INT, JOUR / HOPITAL  LE LONG COULOIR

Giorgio pénètre à nouveau dans le couloir, referme une porte derrière lui. Son regard s'arrête sur l'enfant, tête baissée, qui bat des jambes, toujours assis sur son banc. Une grosse religieuse arrive du fond du couloir et s'approche de l'enfant. Elle se penche au-dessus lui pour lui murmurer quelque chose. La tête relevée vers elle, l'enfant acquiesce à plusieurs reprises. Giorgio reste un instant à les contempler, puis il s'éloigne. La grosse religieuse prend l'enfant par la main, et l'emmène... Giorgio se retourne et les regarde s'éloigner: Les silhouettes de l'enfant et de la religieuse s'amenuisent dans l'immensité du couloir ...

(DEBUT GENERIQUE)

4 EXT, JOUR/ LA DEVANTURE D'UNE CONFISERIE,

Giorgio, en civil. long manteau noir et chapeau, contemple la vitrine d'un confiseur. Il porte une sacoche de cuir noir et un gros sac en bandoulière. son regard s'arrête sur un gros bocal rempli de sucres d'orge de toutes les couleurs...Il entre dans le magasin.

5a EXT. JOUR / UNE RUE BORDÉE DE PAVILLONS

Giorgio longe une rue pratiquement déserte. Il porte sous le bras un impressionnant paquet de papier.Un camion militaire se profile derrière lui et klaxonne. Giorgio se retourne et, au dernier moment, se jette sur le côté, éparpillant sur la chaussée quelques sucres d'orge qui tombent de son paquet. Il les ramasse tout en regardant le camion s'éloigner dans une traînée de fumée.

5 b

Giorgio arrive devant la grille rouillée d'un vieux pavillon. on lit au?dessus du portail. "FONDATION EMILE ROUX"

Giorgio pousse la grille, fait un pas pour entrer, puis se ravise. Il sourit, revient en arrière, referme la grille et tire le cordon d'une cloche. Préparant visiblement une blague, il recule jusque dans l'encoignure de la grille, prend son air le plus sérieux et incline son chapeau de façon à dissimuler ses yeux. Quelques secondes s'écoulent sans que personne ne vienne ouvrir. Le hennissement persistant d'un cheval finit par attirer l'attention de Giorgio. Son chapeau lui couvrant les yeux, il renverse lentement la tête en arrière pour apercevoir de l'autre côté de la rue: un boucher au tablier taché de sang tirant un cheval qui refuse obstinément d'avancer. La bête rue. Un jeune boucher, visiblement l'apprenti, vient bander les yeux du cheval avec une étoffe noire. Giorgio retire son chapeau, pousse à nouveau la grille et rentre dans le jardin de la Fondation, en se retournant vers la rue: L'animal, calmé, s'est remis en marche, les yeux bandés, tiré par le boucher et son apprenti.

6 INT, JOUR / FONDATION ROUX ? HALL' D'ENTRÉE

Les volets des hautes fenêtres sont clos, la lumière pénètre par taches dans le hall désert. Giorgio avance dans la pénombre en regardant autour de lui. D'un geste décidé, il pose à terre sa sacoche et son sac. Gardant son paquet de sucres d'orge sous le bras, gravit avec empressement les marches d'un large escalier de bois.

(FIN GENERIQUE)

7 INT, JOUR / FONDATION ROUX / DORTOIR

La pièce est plongée dans l'obscurité. Giorgio pousse les volets d'une grande fenêtre. Il se retourne et contemple le vaste dortoir abandonné:

des lits de fer poussiéreux et mal alignés sur lesquels il n'y a plus ni drap ni matelas. Comme pour oublier cette vision, il ramène son regard vers la fenêtre et découvre ...

8 EXT, JOUR / TERRAIN DERRIERE LA FONDATION dg la fenêtre)

... ce qui fut probablement un jardin: un bout de terrain chaotique et boueux à l'extrémité duquel on aperçoit les restes d'une maison éventrée par les bombes.

9 INT, JOUR FONDATION ROUX DORTOIR

UNE FEMME (off) Vous cherchez quelqu'un? Giorgio se retourne. Une femme d'une cinquantaine d'années termine de gravir l'escalier, passant de l'ombre à la lumière.

GIORGIO où sont les enfants?

LA FEMME Les enfants ... ? Vous étiez de la maison?

GIORGIO Où sont-ils?

LA FEMME on les a emmenés à la fin 14, juste avant les bombardements ...

Giorgio fixe la femme d'un regard grave: 

GIORGIO Qui les a emmenés ? ... Madame Chevallier?

La femme, mal à l'aise, ne sachant que dire, repart vers l'escalier: 

LA FEMME Bougez pas, je vais vous chercher l'adresse...

Giorgio dépapillote un sucre d'orge et le suce machinalement.

Tout à coup, son regard s'arrête sur une feuille de papier épinglée au mur. Il s'en approche: Il s'agit d'un dessin d'enfant représentant une sorte de chien aux grandes dents, la langue pendante, le tout maladroitement colorié. Pendant ce temps, nous entendons la femme qui, d'en bas, s'adresse à Giorgio:

LA FEMME (off) ... Ils sont mieux là-bas, certainement. Je crois que c'est un petit orphelinat, à la montagne. Entre nous, c'est ce qui pouvait leur arriver de mieux, parce qu'ici ... Vous avez vu ce que les Boches ont fait du jardin? ... Ils avaient un canon à 50 kilomètres!...Allez savoir ce que l'assistance publique va faire de cette maison, maintenant ... Il parait que la mairie veut racheter, mais enfin ... c'est que des bruits!

GIORGIO J'ai vu que la pharmacie avait fermé

LA FEMME (off) Oh y'a bien deux ans maintenant!

GIORGIO Vous savez ce qu'est devenu la jeune fille qui y travaillait?

LA FEMME (off) la petite Françoise, celle qu'était jolie comme un cœur?

GIORGIO (dans un sourire) oui ...

LA FEMME(off) Elle s'est mariée au mois de mai ... avec un monsieur très bien à ce qu'on m'a dit!

Giorgio acquiesce en souriant tristement ...

LA FEMME(off, à elle-même) Ah ben tiens, la voilà votre adresse! (à nouveau à Giorgio:) ... Madame Chevallier m'avait dit que vous faisiez la guerre si loin que vous n'aviez pas le temps de rentrer (on l'entend remonter dans l'escalier) ... la pauvre, elle a été obligée de partir dans le limousin rejoindre sa mère! Elle m'a demandé de jeter un oeil sur la maison ... Elle réapparaît dans la lumière de la fenêtre, un paquet de lettres à la main, des lunettes sur le bout du nez ...

LA FEMME C'est moi qui ai repris la caisse de la boucherie Lebarbier, vous connaissez? ... C'est vous qui écriviez toutes ces lettres? Je les ai fait suivre, vous savez ... mais elles sont toutes revenues ... la poste marche mal...(elle enlève ses lunettes:) Vous êtes le docteur Volli, c'est bien ça ... ?

Giorgio acquiesce. Il suce son sucre d'orge en contemplant le dessin d'enfant.

LA FEMME Ca ne me regarde pas mais ... vous devriez garder l'uniforme ... ça plaît aux femmes! (désignant le dessin) Il est joli, hein? C'est madame Chevallier qui l'a affiché avant de partir. il était dans la lettré des enfants (elle sourit) ... ils doivent jouer avec un chien, là-bas, à l'orphelinat.

GIORGIO 'catégorique) Ce n'est pas un chien. C'est un loup.

Giorgio tend la main vers les lettres que la femme tient entre ses doigts. La femme les lui donne.

LA FEMME Tenez ... (elle pointe l'enveloppe du doigt:) C'est l'adresse que j'ai marqué par dessus, là ... Vous excuserez ... J'écris pas très bien ...

Elle remet ses lunettes et s'approche du dessin pour mieux l'examiner. Puis, enlevant à nouveau ses lunettes, elle se dirige vers la fenêtre.

LA FEMME De toutes façons, on sait pas ce que ça peut avoir dans la tête, ces enfants-là ...

Arrivée à la fenêtre elle aperçoit quelqu'un, au dehors, à qui elle fait un grand signe de main.

LA FEMME (appelant) Coucou! ... Bonjour!

Giorgio range le paquet de lettres dans la poche intérieure de son manteau et rejoint la femme à la fenêtre.

10 EXT, JOUR / TERRAIN BOMBARDE (vu de la fenêtre)

Sur le terrain limitrophe au jardin de la fondation, le boucher et son apprenti finissent d'entraîner cheval aux yeux bandés dans un coin boueux.

L'apprenti tient le cheval par la bride, en lui tapotant gentiment la joue pour qu'il se tienne tranquille. Le boucher, qui porte sur l'épaule une lourde masse, passe devant le cheval pour lui faire face.

LE BOUCHER (souriant à la femme de la fondation) Ca va?!

L'apprenti fait, lui aussi, un amical signe de main en direction de la fenêtre de la fondation. Le boucher échange un regard complice avec son jeune apprenti. Puis, l'air amusé, il fait signe à la femme de se détourner de la fenêtre en lui faisant comprendre, d'un mouvement de sa masse, l'affreux spectacle qui va suivre ....

11 INT. JOUR / FONDATION ROUX ? DORTOIR

... La femme, mi-amusée, mi-horrifiée, se cache les yeux en exagérant son mouvement pour bien le faire voir au boucher. Puis elle se retourne vers l'intérieur de la pièce avec un petit rire: 

LA FEMME Oh mon Dieu! Il va encore en tuer un. J'peux pas voir ça, c'est plus fort que moi!

Elle tourne son visage vers Giorgio, mais en gardant les mains sur les yeux. LA FEMME Quand il fait beau, ça dégage une odeur... Vous sentez? Heureusement que les enfants ne sont plus là ... moi, je serais vous, je regarderais pas.

Giorgio contemple fixement ...

12 EXT, JOUR RETOUR AU TERRAIN (vu de la f enêtre)

... l' animal aux yeux bandés dont les pieds sont plongés dans la boue. Le boucher lève sa masse et s'apprête à frapper.

13 INT, JOUR FONDATION / DORTOIR

GIORGIO (hurlant) Non! Attendez!

Surprise, la femme enlève brusquement les mains de ses yeux pour regarder Giorgio.

14 EXT. JOUR TERRAIN

Le boucher la masse en l'air, s'est retourné vers la fenêtre.

15 INT. JOUR DORTOIR GIORGIO (au boucher) Je vous le rachète!

16 EXT, JOUR / TERRAIN LE BOUCHER (à la femme) Qu'est?ce qu'il dit?!

17 INT, JOUR / DORTOIR

LA FEMME (au boucher) Il veut te racheter le cheval!

18 EXT, JOUR TERRAIN

LE BOUCHER mais c'est plus un cheval, c'est de la viande! Il hausse les épaules et s'apprête à frapper.

19 INT, JOUR 1 DORTOIR LA FEMME (précipitamment, à Giorgio) Combien vous lui en donnez?

GIORGIO (sans réfléchir) 100 francs dans le film le cheval coûte 600 Frs.

LA FEMME (au boucher) Il veut bien t'en donner 100 francs, tu te rends compte!

20 EXT, JOUR / TERRAIN

Le boucher arrête à nouveau son geste.

LE BOUCHER Combien?!

21 INT, JOUR DORTOIR

LA FEMME 100 francs!

22 EXT, JOUR TERRAIN Le boucher, surpris, regarde son apprenti comme s'il n'en croyait pas ses oreilles. 

LE BOUCHER (à la femme) 100 francs?

23 INT, JOUR DORTOIR

LA FEMME 100 francs!!!

24?EXT, JOUR TERRAIN

LE BOUCHER Ca marche, Je fais le tour!

Le boucher pose précautionneusement sa masse sur une pierre et retire l'étoffe qui aveuglait le cheval ...

25?INT, JOUR DORTOIR

Giorgio, visiblement heureux, sort cent francs de sa poche et les tend à la femme qui le dévisage d'un air intrigué.

GIORGIO (dans un sourire) Vous voulez un sucre d'orge?

La femme prend l'argent et, d'une voix presque compatissante:

LA FEMME on dirait que la guerre vous a fait du mal, Docteur ...

26 EXT. JOUR / UNE ROUTE ENNEIGEE

un vent glacé balaie le paysage grisâtre fait de vallons et de sapins. chapeau enfoncé sur la tête, engoncé dans un épais manteau Giorgio conduit une carriole tirée péniblement par le cheval noir racheté au boucher.

EXT. JOUR / CARREFOUR-CALVAIRE A une croisée de chemins, un calvaire dont la croix en est coiffée d'un casque de soldat français. Le vent fait se balancer le casque qui grince contre la rouille croix. Giorgio arrête sa carriole. Il ôte son chapeau et en sort une carte d'état-major. Il remet son chapeau et déploie la carte devant lui comme un journal. Attiré par un bruit alors qu'il est plongé dans la lecture de sa carte, Giorgio relève lentement les yeux pour découvrir à côté de son cheval, une vieille femme vêtue de noir qui la regarde fixement. Un peu plus loin derrière elle, grosse charrette attelée à un cheval est arrêtée sur le bord d'un autre chemin. Assis sur la charrette de dos, la silhouette immobile d'un enfant, vêtu de noir. Il a une grosse tête hérissée de cheveux en brosse et des oreilles décollées. Giorgio sourit timidement à la vieille femme:

GIORIO Excusez-moi, madame, je cherche la route de Chanteloup ...

La vieille femme ne répond pas. Elle se contente de désigner le calvaire.

GIORGIO (parlant plus fort et articulant) Je vais à Chanteloup... Chan-te-loup... l'orphelinat du docteur Degrâce! ... Chanteloup !

La vieille désigne à nouveau la croix puis se détourne pour rejoindre la grosse charrette.

GIORGIO (souriant) Merci, Madame ... Merci!

La femme se retourne et désigne une nouvelle fois la croix. 

GIORGIO Oui, oui, merci, je me débrouillerai ...

Giorgio replie sa carte et la remet dans son chapeau, tout en fixant le dos de l'enfant à la grosse tête. Aux sifflements du vent se mêle un lointain hurlement de loup. Giorgio fouette son cheval ...

28 EXT. JOUR / ROUTE CIMETIÈRE ÉGLISE

Il neige. Des hurlements de loups se font plus présents. Sur le chemin, Giorgio croise des groupes de femmes emmitouflées des pieds à la tête dans de gros lainages sombres: Certaines marchent sur le bord de la route, traînant péniblement de gros sacs. D'autres, dans les champs, rassemblent à coups de pioche des monticules de tourbe gelée. Au passage de la carriole, les femmes arrêtent leur travail pour regarder Giorgio. Giorgio dépasse un cimetière collé à une petite église. Des voix d'enfants s'échappent de la chapelle...

VOIX D'ENFANTS Une fois trois, trois. Une fois quatre, quatre. Une fois cinq, cinq. une fois six, six ... (etc...

Giorgio sourit.

2 9 EXT, JOUR / CHANTELOUP / RUE ET PLACE

Giorgio longe les quelques maisons de pierre, aux toits lourdement enneigés, qui forment le hameau de Chanteloup. Traversant la petite place, il s'arrête devant une femme rude et épaisse, d'une quarantaine d'années, qui se tient sur le perron d'une petite bâtisse portant l'enseigne d'une auberge. GIORGIO Pardon madame, je cherche l'orphelinat du Docteur Degrâce.

L'AUBERGISTE (d'un ton sec, désignant une direction) Faut dépasser les marais, c'est trois kilomètres après la sortie du village. 

GIORGIO Merci

Giorgio la salue de son chapeau et s'éloigne.

3 0 EXT, FIN DE JOUR / ORPHELINAT DU DOCTEUR DEGRACE

Le vent a redoublé, faisant tourbillonner d'épais flocons de neige. Giorgio frappe à la porte. Il porte sa sacoche et son gros paquet de sucres d'orge. son visage marque la joie et l'impatience. Un hurlement de loup le fait se retourner. Il scrute un instant le paysage crépusculaire en remontant le col de son manteau. La porte s'ouvre brutalement sur une jeune bonne au visage bouleversé et à la chevelure en bataille. Saisi par ce regard douloureux, Giorgio marque un temps d'arrêt. 

GIORGIO Bonsoir, je suis bien chez le Docteur Degrâce? Je suis le docteur Volli ...20

LA BONNE (d'une voix blanche) vous ... vous êtes docteur? Venez vite!

31 INT, FIN DE JOUR / ORPHELINAT DEGRACE / UNE CHAMBRE Baigné par le halo orangé d'une lampe à pétrole, un sein émerge de l'écrin de dentelle noire d'une chemise de nuit. Un halètement rauque fait vibrer ce sein sur lequel Giorgio vient doucement poser sa joue, l'œil fixe, presque fiévreux. La respiration de la femme se fait de plus en plus saccadée. Giorgio fait glisser sa tête jusqu'aux lèvres féminines et y applique sa bouche. L'une des jambes de la femme se rétracte en tremblant, retroussant la chemise de nuit jusqu'au haut de la cuisse. Giorgio décolle ses lèvres de celles de la femme et, sans la quitter des yeux, la fait expirer en faisant pression sur son thorax. Il revient à nouveau à ses lèvres et lui souffle de toutes ses forces dans la bouche, en lui pinçant le nez. Il refait pression sur le thorax, réécoute le cœur, se redresse brusquement, inquiet, et joignant ses mains, frappe violemment le thorax. Le corps de la femme s'enfonce et rebondit dans le lit sous la violence du choc. Giorgio, haletant, répète désespérément son geste. En vain ... La femme est morte. Giorgio saisit sur la table de nuit -où l'on remarque son paquet de sucres d'orge- la lampe à pétrole. Il l'approche du visage de la morte. une légère trace violette encercle le cou de la femme. Giorgio y promène ses doigts, comme pour mieux l'identifier. Puis il repose la lampe. Il referme rapidement la chemise de nuit dont le col est agrémenté d'un ruban de soie noire qu'il renoue autour de la trace s'appliquant à former une jolie boucle.

32 INT, NUIT / ORPHELINAT / COULOIR PREMIER ÉTAGE Giorgio sort dans le couloir, sa sacoche à la main, son paquet de sucres d'orge sous le bras. Il se dirige vers la jeune bonne qui le questionne du regard. Giorgio lui signifie, d'un mouvement de tête, qu'il n'y a plus rien à faire. La bonne crispe sa main sur sa bouche et se tourne vers le bas d'un grand escalier pour répercuter la nouvelle, d'un simple regard, à une frêle silhouette féminine qui se dresse dans la pénombre au pied des marches. La silhouette étouffe un gémissement, gravit l'escalier en toute hâte. Giorgio la suit des yeux. Il se tourne vers la bonne et la questionne à voix basse:

GIORGIO Qui est?ce?

LA BONNE (au bord des larmes) C'est mademoiselle Catherine, la fille de Madame Degrâce.

La frêle silhouette disparaît dans la chambre de la morte... 

GIORGIO Pourquoi m'avez-vous parlé de Diphtérie ?

LA BONNE (gênée, fuyant son regard) ... Parce qu'elle a étouffé toue la journée après que je l'aie dépendue ... (implorante:) S'il vous plait, monsieur ... Si vous parlez, elle aura pas de messe ... S'il vous plaît

GIORGIO oui ... je comprends ...

Dans le film la bonne cache que Élisabeth s'est pendue et n'avoue pas tout de suite la pendaison.

LA BONNE (se tortillant nerveusement les doigts) ... Vous lui avez bien remis son ruban?

Giorgio acquiesce en jetant un regard vers le fond du couloir, en direction de la chambre de la morte d'ont la porte est restée entrouverte.

LA BONNE Alors ... vous ne direz rien? Je peux aller chercher monsieur le curé ... ?

GIORGIO (gentiment) Faites ce que vous voulez ... ça ne me regarde pas.

LA BONNE (laissant éclater sa joie) Ah merci! merci beaucoup, Monsieur!

La bonne dévale l'escalier.

GIORGIO mademoiselle, attendez! ... Le docteur Degrâce va-t-il bientôt rentrer?

Au pied de l'escalier, la bonne décroche une cape dont elle s'emmitoufle avec précipitation.

LA BONNE (sans prendre le temps de se retourner) oh, ça m'étonnerait, Monsieur! Il est à Sainte Lucie ... à l'hôpital.

Elle se dirige vers la porte en toute hâte, disparaissant aux yeux de Giorgio.

GIORGIO Les enfants sont avec lui?.

LA BONNE?(off) Quels enfants?

GIORGIO Les enfants de la Fondation Roux... on m'a dit qu'ils étaient ici

LA BONNE (off) Oh, il y a longtemps qu'ils sont morts, Monsieur.

Aussitôt, on entend la porte d'entrée s'ouvrir, laissant s'engouffrer un vent de tempête. Elle se referme en claquant. Le paquet de sucres d'orge tombe du bras de Giorgio et s'écrase sur l'arête d'une marche, déversant une pluie de bonbons qui roulent et ricochent à travers l'escalier. Giorgio reste figé en haut des marches. Un court instant, il prend appui sur la rambarde avec l'air hésitant de quelqu'un qui ne comprend pas. Soudain, comme s'il cherchait quelque chose qu'on lui aurait dissimulé, il se redresse, et d'un bond se précipite vers la première porte du couloir qu'il ouvre violemment...

3 3 INT, NUIT / UNE PETITE CHAMBRE / VUE D COULOIR

... A la faible lumière du couloir, on distingue dans la chambre: trois petits lits de fer bien rangés avec leur couverture soigneusement pliée au pied du matelas, deux petits pupitres, une petite armoire et une rangée de petits portemanteaux où traînent deux petites pèlerines. Tout dans cette pièce est à l'étrange échelle d'une maison de poupée.

34 INT, NUIT / COULOIR Giorgio referme brutalement la porte. Il traverse le couloir et ouvre la porte d'en face pour tomber sur le même décor.

Il se dirige vers une troisième porte, l'ouvre à son tour: même décor à nouveau... En ouvrant et en refermant chacune de ces portes, Giorgio a dû se baisser pour pouvoir atteindre les poignées. (on remarque alors que toutes les portes de ce couloir sont d'une étrange architecture. Anormalement étroites par rapport à leur hauteur, elles présentent des petites poignées placées très bas, à quelques cinquante centimètres du sol, comme si elles n'avaient été construites que pour de tout petits enfants.) Comme pris de vertige, Giorgio marche à reculons en regardant tout autour de lui. Il se retrouve sur le seuil de la chambre de la morte et se retourne vers l'intérieur de la pièce:

35 INT, NUIT / CHAMBRE DE MADAME DEGRACE De dos, agenouillée aux pieds de la défunte, la frêle silhouette de Catherine. Elle tient, tout contre ses lèvres, la main cireuse de sa mère. Giorgio fait un pas discret à l'intérieur de la pièce. Le vent fait trembler les vitres. Brusquement, la jeune fille tourne la tête vers Giorgio, révélant un visage très pâle aux traits extrêmement fins. Ses yeux embués de larmes sont empreints d'une tristesse infinie. Le visage à demi dans l'ombre, Giorgio reste immobile, rivé au regard troublant de Catherine. Il ouvre la bouche, prêt à parler ... Lâchant la main de sa mère, Catherine se lève et avance lentement vers Giorgio, sans le quitter des yeux. Elle s'arrête devant lui, fait glisser ses mains dans les cheveux de Giorgio et attire ses lèvres contre les siennes. Elle l'embrasse avec violence, longuement... Giorgio ne bronche pas. Tout à coup, la jeune fille relâche son étreinte et s'enfuit en courant hors de la chambre. Giorgio, totalement désemparé, se retrouve seul face à la morte. Le cou lacé de son ruban de soie noire, la main qu'embrassait Catherine pendant hors du lit, le cadavre repose dans la pénombre. (De lointains hurlements de loups se mêlent au vent.)

GIORGIO (se précipitant clans le couloir) mademoiselle!

36 INT, NUIT / ESCALIER + HALL D'ENTRÉE

Giorgio descend quatre à quatre les marches parsemées de sucres d'orge. GIORGIO mademoiselle! ... Attendez'!

Dans le hall, des rafales de neige pénètrent par la porte d'entrée laissée grande ouverte. Giorgio s'arrête un bref instant sur le seuil.

GIORGIO (criant vers le dehors) mademoiselle!

Il sort en courant ...

37 EXT, NUIT / ORPHELINAT + CAMPAGNE ENVIRONNANTE

Fouetté par le vent, Giorgio court droit devant lui, ralenti par l'épaisse couche de neige qui entrave chacun de ses pas. 

GIORGIO (criant) mademoiselle! Revenez!

La silhouette de Catherine disparaît dans la nuit.

A bout de souffle, Giorgio s'arrête, les jambes enfoncées dans la neige jusqu'aux genoux. La main sur la poitrine, il cherche sa respiration.

GIORGIO (reprenant son souffle encre chaque mot) mademoiselle! ... (il tousse) Revenez! Je vous en prie! ... Mademoiselle!

Une toux plus violente l'oblige à se recroqueviller sur lui-même. Lorsqu'il se redresse, il se met à pleurer comme un enfant. Il se mord la main pour étouffer ses gémissements et se retourne pour contempler la maison des Degrâce: La façade lourde et austère de l'orphelinat se dresse dans la nuit. (on entend siffler la respiration rauque de Giorgio)

38 INT, NUIT / AUBERGE DE CHANTELOUP

Couvert de neige, l'air hagard, Giorgio entre, chargé de sa sacoche. A la lumière poisseuse des lampes à pétrole, de pauvres murs de caillasse noire traversés par des poutres distordues. Un comptoir tout de guingois, du même bois sombre et rongé que les quelques tables et chaises qui font cercle autour d'un poêle estropié. Au fond de la salle, un escalier tordu mène à l'étage. Trois femmes au visage rude, abîmé par le temps, sont assises à la même table. L'une d'entre elles, la plus âgée, tire sur une grosse pipe de maïs ( il s'agit de la Mère Petaud). Derrière son bar, l'aubergiste (la femme entr'aperçue sur les marches de l'auberge). Face à elle, les deux mains posées à plat sur le comptoir, une longue femme maigre d'une soixantaine d'années, les yeux plongés dans un bol de vin fumant. Toutes ces femmes se sont tues et dévisagent Giorgio sans broncher. Giorgio vient déposer ses bagages au pied du bar. Puis il penche la tête en avant pour enlever son chapeau qu'il pose à l'envers sur le comptoir. Il retire machinalement ses gants en regardant une photo encadrée posée à côté d'une rangée de bouteilles. Il s'adresse à l'aubergiste avec ce ton détaché, presque enjoué, que prennent parfois les gens désespérés ...

GIORGIO (désignant la photo) C'est votre mari?

L'AUBERGISTE C'est mon Marcel!

GIORGIO votre quoi?

L'AUBERGISTE (froidement, après un Temps) ... Mon Marcel, mon fils!

UNE FEMME Il est dans les Balkans!

Brusquement vide de toute expression, Giorgio acquiesce en s'emparant d'une bouteille posée sur le comptoir. Aussitôt, l'aubergiste lui avance un verre. Elle en profite pour jeter un oeil à l'intérieur du chapeau de Giorgio: il est rempli de sucres d'orge.

GIORGIO (se servant à boire) Vous auriez une chambre pour la nuit?

L'AUBERGISTE (repartant vers le fond du comptoir) Avec le cheval c'est trois francs! (dans le film le prix est de trois francs cinquante)

L'aubergiste se met à caresser de façon maternelle le petit crâne aux cheveux gras de la vieille femme maigre qui se tient de l'autre côté du bar. cette dernière, sans détacher le regard de son bol de vin, racle lentement le bois du comptoir avec ses ongles, en laissant s'échapper d'imperceptibles gémissements. Giorgio prend le verre et la bouteille puis se dirige, fébrile et chancelant, vers une table vide. Un léger craquement se fait entendre en haut de l'escalier: Nous découvrons une petite fille d'environ six ans, en chemise de nuit, qui se tapit dans l'ombre des marches. Elle observe Giorgio entre les montants de la rampe. Giorgio s'affaisse sur une chaise et ingurgite mécaniquement plusieurs verres de suite, sous le lourd regard des femmes.

LA MÈRE PETAUD (à l'aubergiste) Il paraît qu'elle est morte, la Degrâce?

L'AUBERGISTE Faut demander au Monsieur, il en revient ...

GIORGIO (les yeux rouges), Qu'est-ce qui est arrivé aux enfants?

L'AUBERGISTE Ceux de l'orphelinat?

Une des femmes assises se signe en marmonnant. L'aubergiste contourne son bar et s'avance vers la table de Giorgio.

L'AUBERGISTE (sur un ton de réprimande, élevant anormalement la voix) C'est les loups qui les ont mangés!!

GIORGIO (médusé) TOUS...?

L'AUBERGISTE (s'énervant) Parfaitement! Et ils n'en ont fait qu'une bouchée, parce que c'étaient de sales gosses!..(hurlant:) Poulette!!! ...

L'aubergiste vient de tourner violemment la tête vers la petite fille embusquée dans l'obscurité de l'escalier.

L'AUBERGISTE ... va te coucher, je te le répéterai pas deux fois!

La petite fille s'enfuit en courant vers l'étage. L'aubergiste se retourne vers Giorgio:

L'AUBERGISTE (se radoucissant) Non ... Je vous disais ça à cause de la, petite. En vérité, ils se sont noyés dans les marais.

Toujours appuyé au comptoir, la longue femme maigre gémit un peu plus fort en se balançant d'avant en arrière.

UNE FEMME(d'un ton inquiétant) C'est le docteur Degrâce qui leur a fait une piqûre. Et ça les brûlait tellement qu'ils se sont jetés dans l'eau.

UNE AUTRE FEMME Et même qu'ils étaient tellement bouillants, que 'La glace elle a fondu, et que l'eau, elle fumait. Je sais, j'ai tout vu!

L'AUBERGISTE Dis donc pas de bêtise, Marthe, t'étais pas là.

MARTHE C'est que quelqu'un me l'a raconté, alors!

L'AUBERGISTE Tu sais bien qu'il y avait personne!

MARTHE (agacée) De toutes façons, tout le monde le sait, ici! Elle dit dans le film "De toute façon, ici, tout le monde sait ce qui c'est passé"

 

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