Scènes Inédites

Conçu et tourné comme un diptyque, Jacquou le Croquant est ramené à un unique film de deux heures trente. Sept scènes coupées au montage figurent pourtant au scénario original, ainsi qu'une longue Bande-Annonce de quatre minutes déjà montée (en bas de page).

 
A l'époque du tournage, il est prévu de faire de Jacquou le Croquant deux films de deux heures chacun, devant sortir à un mois et demi d'intervalle. La première partie sera consacrée à l'enfance de Jacquou et la seconde à son âge adulte. Laurent Boutonnat émet même l'idée d'un diptyque, deux films indépendants et aux titres différents, avec chacun leur fin propre. Trop risqué financièrement pour Pathé, qui refusera. Il sera finalement décidé de rassembler l'action en une seule partie, inférieure à 2h30. Pourtant le scénario est peu modifié et c'est bien l'intégralité des deux épisodes que Laurent Boutonnat tournera, et à l'intérieur desquels il devra élaguer au montage. Le scénario du film, lui, a conservé la trace de sept de ces séquences...

 

L'incendie de la Fôret Barade, coupée au montage

 

    Extrait 1 :

Marié Ferral et son fils, Jacquou, reviennent de Périgueux où Martin, le père a été jugé coupable et condamné au bagne.

EXT. JOUR - CAMPAGNE

Au loin, l'angélus tinte dans la campagne. Le soleil du soir allonge les ombres d'hiver sur la route. Jacquou et sa mère, silencieux, retournent chez eux, bringuebalés dans une carriole que leur a trouvée Maître VidalFongrave. Un paysan tout rond tient tes rênes, Jacquou est allongé dans une panière accrochée entre tes roues de ta mauvaise charrette ; les jambes de sa mère, assise à l'arrière, pendouillent devant lui. Soudain, ta carriole cahote et un sabot de sa mère tombe par terre. Jacquou saute le ramasser et revient lui glisser au pied. Il tente de protéger sa mère en lui recouvrant tes épaules de son châle.

 

INT. NUIT - MAISON DES FERRAL

A la nuit tombée, serrés l'un contre l'autre dans le grand lit un peu bancal, la mère et le fils, emmitouflés dans leurs manteaux, tentent de se réchauffer. Dans la cheminée, un feu crépite.

-Tu sais, mon Jacquou, je n'ai jamais aimé un autre homme. J'avais quinze ans quand je l'ai vu pour ta première fois à un bal. Nous avons dansé, une seule fois. Trois mois plus tard, quand il est revenu de campagne, nous avons décidé de ne plus nous quitter... Mon Dieu, ne me reprenez pas ce que vous m'avez donné... 

- Ne pleure pas, maman, ne pleure pas...

L'incendie de la Fôret Barade, coupée au montage

 

    Extrait 2 :

Marie Ferral et son fils sont chassés de leur maison. Ils iront à la Tuilière.

EXT. JOUR - MAISON DES FERRAL

Un gros bonhomme gras et suant conduit une charrette tirée par deux bœufs. à l'arrière, six enfants criards et une matrone vulgaire. Jacquou et sa mère, intrigués, s'approchent de l'étrange équipage. Le second régisseur du comte, un acolyte et deux chiens noirs menaçants surgissent à leur tour.

- Ordre du comte, les Ferral, faut déguerpir ! C'est cette famille-là qui reprend la métairie.. Vous avez une heure pour faire vos paquets ! Et j'ai reçu consigne de bien vérifier ce que vous embarquez...

- Ouvrez vos baluchons ! J'ai ordre de vérifier ce que vous prenez...

La mère de Jacquou ne dit mot. Le regard noir, elle se tourne vers les hommes du comte de Nansac. Ils n'osent pas avancer. Elle sort de la maison, fière, droite, dans sa robe élimée.

 

EXT. JOUR - LA TUILIÈRE

La mère s'arrête sur le seuil, deux baluchons dans une main, une marmite dans l'autre.

- Vous n'êtes que des voleurs ! lâche-t-elle au régisseur.

- Aller donc voir le comte ! Dans cette tenue, peut-être aura-t-il pitié !

D'un mouvement vif, elle se retourne et lui tance un coup de genou dans l'entrejambe. Il s'écroule à quatre pattes. Elle crache sur la porte et s'engage sur le chemin. A la tombée du jour, Jacquou et sa mère parviennent à la Tuilière, une masure en ruine dans ta forêt. Pendant que le fils aligne des branches de pins en guise de sommier, la mère consolide une poutre pour que le toit ne s'effondre pas.

 

    Extrait 3 :

Après la promesse de vengeance contre le château des Nansac, Marie, malade, est raccompagnée à la maison par Jacquou

EXT. JOUR - PRÉCIPICE

Jacquou et sa mère se retrouvent sur un promontoire escarpé surplombant la Dordogne. Le vent froid du nord et la pluie les giflent. Face à eux, sur l'autre versant de la rive, la masse imposante du château des Nansac surgit dans ta nuit.

- Mon fils, n'oublie jamais que cette bête ne dort pas et que rien ne ta rassasie jamais. Elle vit de notre peur et de notre sang. Toi, château assassin, je te maudis ! Oui, je te maudis !

 - Soyez maudits ! ajoute Jacquou d'une voix forte.

Avant de prendre par la main sa mère qui grelotte, pour la raccompagner à La Tuilière.

(…)

EXT. NUIT - LA TUILIÈRE

 Mais il est déjà trop tard. Les fièvres sont en elle. En dépit des efforts de Jacquou qui brûle les quelques meubles et multiplie les couvertures pour que sa mère n'ait plus froid, rien n'y fait. Au petit matin, elle n'est plus. Son visage a enfin trouvé ta sérénité.

(…)

EXT. JOUR - PARVIS DE L'ÉGLISE

- Cette femme ne venait jamais à la messe ! Elle n'était pas des nôtres, c'était même une forte tête ! Pour les gens comme elle, il n'y a que la fosse commune. Il est hors de question que je prononce la moindre parole à son intention, ce serait encourager le repentir de dernière minute ! Monsieur le maire est déjà bien bon d'avoir rétribué des chrétiens pour mettre cette femme-là en terre. Et puis enterrer quelqu'un un lundi... C'est jour de marché ! Allez, va-t-en, et que l'on ne te revoit plus par ici.

Jacquou ne dit rien. et ne pleure même plus. Il regarde ce prêtre, et s'en retourne dans la forêt.

 

    Extrait 4 :

Jacquou a fuit dans la forêt après avoir mis le feu à la forêt du comte…

EXT. NUIT - FORET BARADE

Jacquou continue sa marche dans la forêt en serrant contre lui le sabot de sa mère. Au Loin, une cloche appelle les fidèles aux vêpres. Le petit croquant s'agenouille La forêt s'endort... Les oiseaux chantent, les cerfs s'abreuvent, les sangliers s'affrontent et les premières flammes s'élèvent. Le vent de l'Est embrase toute la forêt de l'Herm, la forêt du comte de Nansac. Du haut d'un hêtre où il grimpait souvent avec son père, Jacquou observe la progression du feu... et de la terreur. Dans les villages, Prisse, Les Foucaudies, Les Landes et bien sûr à l'Herm, le tocsin s'acharne avec des tintements pressés et sinistres.

(…)

EXT. JOUR - ROUTES DE CAMPAGNE

Mais la vengeance ne donne pas de pain. Le gamin cherche donc à louer ses bras. Bien vite, il s'aperçoit que les gens ne se mettront pas le comte à dos en faisant travailler le fils de Marti, l'insoumis. Jacquou devient Mathieu, un orphelin de Bergerac. Le subterfuge marche : Jacquou trouve à s'employer chez un gros et gras fermier à moustaches plus empressé à prendre du bon temps avec ses servantes qu'à cultiver ses champs.

 

    Extrait 5 :

Parallèlement aux préparatifs du bal, Jacquou s'entraîne avec Lina, non loin de là… 

EXT. JOUR - CIMETIÈRE DE FANLAC

 Dans les champs qu'il laboure, Jacquou n'a pas souvent le temps, ni l'occasion, de danser. Alors quand les festivités de la Saint-Rémy approchent et que les menuisiers du village installent, sur la place de l'église, l'estrade sur laquelle monteront les danseurs pour être départagés lors du concours de danse, par les vieilles de Fanlac, nos tourtereaux doivent bien s'entraîner pour être les meilleurs danseurs... Et où trouver un endroit plus calme et plus loin des quolibets que te cimetière ? C'est donc là, dans les athées entre les tombes, qu'à la nuit venue, Jacquou et Lina apprennent à danser... Enfin, c'est surtout Jacquou qui apprend ! Lina, elle, patiente, le guide, tant dans le menuet ou la ronde que dans la valse, la danse interdite par les ultras et l'église rigoriste.

 

 EXT. NUIT - CIMETIÈRE DE FANLAC

 Une nuit, Lina, son tendre regard plongé dans celui de son amoureux, lui glisse :

- Tu es devant moi et en même temps, tu es encore dans le château des Nansac. Mon Jacquou. Ne laisse pas la vengeance détruire ta vie...

L'incendie de la Fôret Barade, coupée au montage

 

 

    Extrait 6 :

Avant que le concours du bal ne commence, en retrait, Mario demande un aparté à Jacquou. C'est lui qui le dénoncera plus tard au comte et permettra sa capture.

EXT. JOUR - PLACE DU VILLAGE

 C'est toi Jacquou ? Moi, c'est Mario et Je voulais te dire de t'écarter de Lina. Cette petite sera mieux avec moi qu'avec un bon à rien comme toi ! Mario qui, mine de rien a sorti un fouet, achève à peine sa tirade qu'il prend le poing de Jacquou en plein ventre. Mais, déjà, il se relève et se jette sur Jacquou un couteau à la main... Soudain, un coup sec d'échasse de berger le désarme.. Quatre bergers sont là, à observer en souriant Jacquou et Mario.

- Eh, vous autres ! J'ai l'habitue de régler mes affaires seul ! intervient Jacquou... Et le croquant se jette sur tes bergers...

C'est ta bagarre généralisée ! Mais très vite, un berger avec une vilaine cicatrice sonne ta fin des hostilités : - C'était donc toi le petit garçon dans la neige ?

- Ton père, notre colonel, serait fier de toi ! ajoute un autre berger très costaud.

Tous éclatent de rire, y compris Le Bigleux et Touffu, qui viennent d'arriver pour prêter main-forte à leur copain.

- Jacquou, si un jour on te cherche des noises, fais-nous chercher ! poursuit un autre frère d'armes de son père.

Mario, quant à lui, l'air franchement dépité, quitte ta joyeuse bande rigolarde qui se dirige vers les buffets de la fête...

 

    Extrait 7 :

Quelques jours après la mort du curé Bonal, Jacquou se recueille devant sa tombe…

EXT. JOUR - CIMETIÈRE

 Depuis les obsèques, la veille, notre brave Jacquou est là, à genoux... Cela fait un jour et une nuit... Touffu n'a pas lâché son copain des yeux durant cette Longue veillée sur ta tombe du curé Bonal. Autour de Jacquou, des dizaines de bouquets de fleurs et des petites gerbes de blé recouvrent ta terre fraîchement retournée. Lina arrive et s'approche doucement de lui. Elle pose sur ses épaules un lourd manteau. Jacquou tressaille. Et regarde Lina, qui lui caresse tes cheveux...

- C'est fini, ma Lina ! On va partir pendant qu'il en est encore temps... Sinon, je vais redevenir une bête... Tu sais, il y a quelqu'un au fond de moi de très mauvais... Et si je reste, ce quelqu'un entrera un jour dans le château des Nansac et tes tuera tous, jusqu'aux Lézards qui dorment sur les pierres des remparts !

Textes du scénario : Laurent Boutonnat et Franck Moisnard
rédigés par Denis Boulard
extraits du livre Jacquou le Croquant, Éditions Hachette Livre, 57 p.
photos : scène de l'incendie de la forêt de l'Herm

 
 

Bande-annonce extra longue de décembre 2005 (3'56") :

    

Laurent Boutonnat a-t-il monté cette longue bande-annonce en vue de promouvoir la saga en 2 épisodes qu'il voulait sortir ? Ou pour une éventuelle présentation en festival ou marché du film ?
Toujours est-il qu'elle contient les extraits de plusieurs scènes absentes de la version finale, notamment l'incendie de la forêt et la déclaration de Jacquou enfant prétendant avoir tué les chiens du comte de Nansac (épisode présent dans le roman).
TF1 en avait diffusé un court extrait dans son 20H du 29 décembre 2005. Puis un autre extrait a été diffusé dans le Grand journal sur Canal+ le 27 mars 2006. A la sortie du film, le site internet de la Banque Populaire s'en sert et la met intégralement en ligne pour un jeu-concours. Pour finir, on retrouve quelques extraits de cette bande-annonce repris dans le making of du film monté pour Canal+ et diffusé sur cette chaîne le 21 janvier 2007.
     Cette bande-annonce rare (encodée à l'époque de sa mise en ligne par la Banque Populaire) est maheureusement reproduite ici en mauvaise qualité. Merci de nous prévenir au cas où vous en détiendrez une meilleur version.

    

    

 

 

Jodel Saint-Marc, le 5 mars 2007
Ajout de la Bande-Annonce extra longue le 13 janvier 2010
(merci à Hervé Moinardeau)

 

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