C'est la première fois en huit ans que Laurent BOUTONNAT
à pour mission de coller des images et une histoire sur un texte de Mylène FARMER.
Après avoir composé la musique de Moi...Lolita et lui avoir laissé le
soin d'écrire les paroles, Laurent BOUTONNAT réalise
(assez tardivement) ce clip très attendu. Bien qu'il tourne -comme à sa grande
époque- en pellicule 35 mm, il ne travaille plus avec la même bande de copains
tels Carine SARFATI pour les costumes ou Jean-Pierre SAUVAIRE
pour la lumière. Ce dernier sera remplacé par Philippe PAVANS.
Tourné dans le plus grand secret à la fin du mois de juin après une longue
préparation, le film est diffusé pour la première
fois le mercredi 26 juillet
2000. Laurent BOUTONNAT qui avait souvent l'habtude
d'avoir recours aux comédiens professionnels (Zouc, Louise FLETCHER,
Frederic LAGACHE) a engagé ici des acteurs semi-amateurs
comme Jérôme DEVOISE, qui joue le rôle du garçon
amoureux ou Liliana, la sœur de Alizée dans le film. Seule Anne-Marie PISARINI,
qui endosse le rôle de la maman de Lolita est habituée des plateaux. Le tournage s'est déroulé sur deux jours. Le
premier
jour de tournage s'est fait en extérieur pour les prises
de vue des grands champs d'orge, de la route et de la cour de la maison de la
mère.. Laurent BOUTONNAT est
allé tourner ces scènes dans les environ de Senlis, dans l'Oise. Le deuxième jour de tournage
a été nécessaire pour les plans dans la discothèque parisienne des Bains-Douches
où une centaine de figurants ont été engagés.
Ce clip est bien sûr éloigné de ceux que Laurent BOUTONNAT
réalisait pour Mylène FARMER il y a huit ans. Ce qui est
étrange en revanche, c'est qu'il est aussi éloigné de ceux qu'il faisait pour
Nathalie CARDONE il n'y a pas encore si longtemps... Pour
elle il avait soit renoué avec ses mises en scène à grand spectacle (Hasta
Siempre-1997), soit donné dans le laconique qui jouait essentiellement sur
une certaine image de la chanteuse (le lait de Populaire-1998
ou le ciel nuageux de Mon Ange-1999). Laurent BOUTONNAT
semble être capable, aujourd'hui, de raconter des histoires de notre époque,
de s'éloigner des fonds de guerre, de siècles reculés ou des contes
intemporels. Cette fois- ci, Laurent BOUTONNAT
s'est certes remis aux clips scénarisés mais il a délaissé l'ambiance,
l'univers et le thématique pour se concentrer sur l'esthétisme de sa nouvelle
héroïne. Certes sont toujours présentes la misanthropie inhérente à son
oeuvre et la dureté des personnages les uns envers les autres. Personnages
sensés -sinon s'aimer- s'apprécier, tels la mère et sa fille, Lolita avec je
garçon amoureux... L'important semble être pour lui l'opinion qu'on se fera de
Lolita... et par extension d'Alizée. C'est pour ça qu'on est en droit de
croire que ce clip est peut-être le premier d'une série à part entière,
cohérente, avec ses symboles propres (bien que rares) qui nous fera suivre en
quelque sorte... les aventures d'Alizée... Après une première saga en deux
épisode où il avait donné comme prénom à son héroïne l'adjectif
"libertine", Laurent BOUTONNAT pourrait bien
faire de Lolita une nouvelle héroïne récurrente. La suite au prochain épisode ?
En
rase campagne, un homme d'une trentaine d'années court après une jeune fille
de quinze ans.Elle s'arrête. L'homme est gêné, visiblement très
impressionné par la jeune Lolita. Il lui déclare sa flamme et il veut juste
savoir si elle l'aime. Les regards sont tendres, la déclaration
sincère. La
réponse de Lolita est celle-ci : "-T'as pas 200 francs ? Merci, je te les
rendrais" Dans cette
introduction de clip, Laurent BOUTONNAT vient de nous
présenter le personnage de Lolita. En une phrase on sait à qui on a à faire.
Tout le reste du film ne sera qu'une longue confirmation. Les 200 Frs en poche,
Lolita rentre chez elle, sans
un regard pour le
garçon amoureux. Il restera sur
la route, attendant un nouveau signe de vie de la mineur dont il est tombé
amoureux. Se prostitue t-elle ? Lui a-t-elle laissé croire un possible amour ?
Lolita est tout simplement une fille qu'on aime regarder, et à qui on donnerait
tout. On
reconnaît à son arrivée dans la cours de sa maison le vocabulaire de
Laurent BOUTONNAT. Le léger travelling avant latéral qu'il utilise pour
introduire un lieu rappelle ceux de l'orphelinat de Giorgino (1994) ou
celui de la maison cubaine d'Hasta Siempre (1997). Sa mère lave le linge
et sa petit
e sœur de 6 ans est assise sur les
marches de la maison (telle "poulette" dans l'auberge de Giorgino).
La mère s'avance de Lolita pour l'insulter, lui faire de violentes remontrances
quand à sa tenue et son retard. Lolita prend sa sœur, se change et part à
travers les champs avec elle. Elles rejoindront le bus qui les amènera en
ville. L'homme aura beau courir, il ne parviendra pas à le rejoindre avent son
départ. Il pourra juste apercevoir la jeune fille partir dans son bus, par les
vitres arrières.
Le soir même, elle est dans une
discothèque où, au
milieu des filles sur-maquillées et très peu vêtues, elle danse sans se
cacher d'être la plus
jeune en ce lieu. Peu à peu, tous les regards
convergeront vers elle. Qu'elle danse au milieu de la piste ou qu'elle se
remaquille dans les toilettes, autant les hommes qu les femmes tombent sous le
charme. Dans sa petite robe légère, on ne peu rien faire d'autre que de
l'aimer. Lolita a posé sa petite sœur sur un tabouret du bar où elle regarde
sa grande sœur devenir un phénomène. L'homme de la campagne l'a suivi.
"J'entends tout autour de moi : Hello, helli, t'es à moi... Lolita"
Il est
là. Il vient d'entrer dans la discothèque où il regarde médusé Lolita qui
danse au milieu des gens âgés de dix ans de plus qu'elle. Lolita n'y prête
pas attention, le principal pour elle semble être le nombre de regards qu'elle
attire, et non pas leur
identité. La petite sœur se met maintenant elle aussi
à danser sur son tabouret en regardant Lolita sur la piste. On verra finalement
les deux sœurs rentrer au petit matin, main dans la main, sur une
route de campagne. C'est cette petite l'unique objet
de son attention. La petite dira juste à sa sœur : "-Moi, je suis un peu fatiguée".
Pas de réponse. Elles s'en vont toutes deux au loin, l'homme amoureux est encore là derrière
qui suit Lolita, et qui la suivra probablement longtemps...
Outre les mouvements de
caméra et des images rappellent Giorgino, on peut
aisément pousser le raisonnement beaucoup plus loin en ayant pour ligne de mire
la comparaison entre ce titre et le film. Tout d'abord, les paroles ne peuvent
que recréer une certaine paranoïa qui nous rappelle celle de Catherine :
"C'est pas ma faute". On peut aussi étendre certaines phrases à
l'autisme dont elle était victime :
"Quand je donne ma langue au chat, ils
sont tous prêt à se jeter sur moi". C'est aussi Lolita qui "rêve
aux loups", alors que c'est précisément ce qu'on reprochait à Catherine;
qui aurait rêvé aux loups lors de la noyade des orphelins. Quand à l'intro du
titre, au violon, il rappelle le thème de la bande originale de Giorgino qui passerait en boucle. A tout début du clip, on assiste d'ailleurs à une
scène figurant, dans sa mise en scène et dans sa réalisation à une séquence
de Giorgino, qui
correspond à la véritable première apparition de
Mylène FARMER dans le film... Nous évoquons ici la
scène où Giorgio vient de sortir de l'auberge, traverse la place du village
et rattrape par le bras Catherine qui s'enfuit. Elle se retourne alors
pour lui demander de réclamer de le payer... Dans Lolita, c'est elle qui
demande au jeune homme la même chose.