Jacquou,
ce n’est pas ton premier film..
Non,
c’est mon troisième. Avant Jacquou le Croquant, j’ai joué dans Tout pour
plaire (de Cécile Telerman, avec Anne Parillaud, Judith Godrèche et Mathilde
Seigner), et dans un court métrage. Après, j’ai fait un autre film qui
s’appelle Les yeux bandés [de Thomas Litli, avec Jonathan Zaccaï et
Guillaume Depardieu]. Mais Jacquou le Croquant, c’est mon plus grand rôle.
As-tu déjà suivi
des cours de comédie ?
Non.
Mais avant le début de Jacquou le Croquant, j’ai travaillé avec un coach
pendant un mois. Elle m’a surtout fait répéter mon texte.
Comment t’es-tu
retrouvé à interpréter Jacquou ?
J’ai
passé le casting. Il y a eu une présentation filmée, puis une rencontre. Après,
ils m’ont rappelé. J’ai dû apprendre un texte et puis, ils m’ont appelé
à nouveau et là, il y avait Laurent Boutonnat qui assistait au casting. J’ai
joué deux scènes qui sont dans le film, une entre Jacquou et le curé, et une
autre entre Jacquou et sa mère.
Avais-tu le trac ?
Non.
Mais j’avais surtout peur de ne pas être pris... C’était un casting
important, c’était un gros film. Jacquou, ce n’est pas un rôle qu’on
vous propose tous les mois. Ca me faisait peur vraiment de ne pas être
choisi...
Qu’est-ce qui t’a
frappé en voyant Laurent Boutonnat la première fois ?
Sa
gentillesse. Il avait l’air gentil et effectivement, il est gentil. Sur le
tournage, il était comme un papa. Et puis, c’est incroyable comme il
travaille ! Franchement, je l’admire. Je ne pensais pas que les réalisateurs,
ça travaillait jusqu’à minuit tous les jours...
Que t’a-t-il dit du
personnage de Jacquou ?
Que
c’était un enfant à qui il arrive des choses terribles mais qui ne pleurait
jamais. Il est triste parce que ses parents meurent, mais c’est une tête
dure. Jacquou, c’est quelqu’un qui veut prendre soin de ses parents, qui ne
veut pas que son père aille en prison, que sa mère meure mais il se retrouve
seul. Et pourtant, il ne craque pratiquement jamais. Il est très secret, peu
bavard.
Est-ce un personnage
qui est proche de ce que tu es ?
Un
peu sans doute mais moi, j’aime bien dire les choses, j’aime bien discuter.
Qu’est-ce qui te
faisait le plus peur dans l’aventure de Jacquou le Croquant ?
Comme
c’est quand même un gros rôle, je devais tourner longtemps. Ça me faisait
peur de partir longtemps tout seul en Roumanie. Mais après, je me suis habitué.
Mon coach m’avait accompagné. Mes parents venaient me voir à peu près tous
les quinze jours, et puis je suis revenu quelques fois en France aussi. Le plus
difficile en fait, c’était de faire mes devoirs en même temps puisque le
tournage s’est déroulé aussi en période scolaire. Tous les quinze jours, ma
mère me rapportait une enveloppe de mon professeur et je devais rattraper tous
mes cours et faire mes devoirs. Il y a quand même des jours où je rentrais
tard du tournage et c’était dur d’enchaîner. Bon, il y avait les dimanches
mais là, j’étais le seul à travailler !
Quel a été ton
sentiment lorsque tu t’es vu pour la première fois dans le costume de Jacquou
?
Je
ne me suis pas reconnu. Je me suis dit que j’avais vieilli de 200 ou 300 ans.
C’était facile de
retenir les dialogues ?
Ça
va. Le texte, vous l’apprenez la veille, après vous n’avez plus qu’à le
jouer. Ce n’est pas comme à l’école où il faut apprendre les poésies et
les réciter par cœur. Ça, c’est une tannée ! Mais là, on dit le texte à
sa façon et surtout, ce que j’aime, c’est jouer avec quelqu’un d’autre.
Quand je dis un texte, j’aime bien que quelqu’un me réponde.
Il y a des scènes
d’émotion dans le film - la mort de la mère de Jacquou, la mort de son père.
Pour toi, était-ce facile à jouer. Comment faisais-tu ?
Je
me mettais dans l’état du personnage. Quand il était énervé, je m’énervais.
Quand il était triste, j’essayais de penser à des choses pas gaies. Ce
n’est pas toujours facile parce que, franchement, quand vous avez la pêche et
qu’on vous demande de faire une scène où vous êtes presque en train de
mourir... Il fallait changer d’attitude et de caractère tout de suite. Ce
n’est pas évident. Mais Laurent était là qui m’aidait. Il venait me
parler, m’expliquer tout dans le moindre détail. Et puis en fait, quand il
veut quelque chose, il le veut jusqu’au bout et ... il l’obtient !
Comment
t’entendais-tu avec les autres jeunes acteurs qui forment la bande de Jacquou
?
Très
bien. C’étaient des potes. Mais en Roumanie je ne les voyais pas souvent. Je
me retrouvais donc un peu seul. Mais les grands acteurs, heureusement, étaient
très sympas. Marie-Josée Croze et Albert Dupontel, qui jouent les parents de
Jacquou, ils sont vraiment drôles. Albert fait toujours des têtes marrantes. A
chaque fois qu’on finit une prise il dit toujours une blague, il est toujours
très gai. Marie-Josée aussi. Et quand il y avait une scène d’émotion, on
disait : « On y va, on déconne pas ! » Olivier Gourmet, il est très sympa
aussi. Franchement, il n’y avait aucun problème.
Et les scènes avec
la petite amie de Jacquou, Lina, ça te plaisait ?
Oui,
c’était amusant à faire. Clémence Gautier est très sympa. Je ne l’ai pas
revue depuis la fête de fin de tournage. Sur le tournage, il y a plein de gens
qui m’ont chambré parce qu’elle m’a fait un bisou sur la joue !
Gaspard Ulliel joue
Jacquou adulte. Aviez-vous travaillé ensemble avant le tournage ?
Non,
mais on a beaucoup de points communs, je trouve, au niveau physique. Et puis
Jacquou reste Jacquou, avec son caractère. Il n’y a pas mille façons de le
jouer. Qu’est-ce qui t’as le plus surpris sur le plateau ?
De
voir tout ce qui se passe autour. Quand on regarde un film, on est dedans. On ne
s’imagine pas tout ce qu’il y a autour, toutes les caméras, tous les
appareils qu’il faut, tous les gens qui travaillent sur le plateau... Ce qui
m’a étonné c’est que quand j’ai vu les extraits, je n’en revenais pas
de découvrir des trucs dans l’image que je n’avais même pas remarqués sur
place !
As-tu gardé des
souvenirs du tournage ?
Les
sabots de Jacquou.
Quel est ton meilleur
souvenir de toute l’aventure de Jacquou le Croquant?
C’est
difficile. Tout était bien, toutes les scènes étaient bien. J’ai bien aimé
celle où je sors de la tuilière et où tout est orange... Mais franchement,
tout m’a plu.
Et ton pire souvenir?
Le
pire, c’était quand je jouais dans le froid pendant le pré-tournage, en février
en Roumanie. Pour la scène où mon père se fait capturer et où Laurent
voulait qu’il y ait de la neige...
Comment tes copains
à l’école voient-ils ta carrière d’acteur ?
Les
miens, ils sont très respectueux. Mais souvent les copains de ma sœur, parce
que je suis dans le même collège qu’elle, m’appellent dans la cour : « Oh
l’acteur ! l’acteur ! » Ça, je n’aime pas trop...
As-tu un acteur préféré
qui pourrait être ton modèle ?
Non,
moi j’aime bien regarder des films comme ça mais je n’ai pas un acteur préféré.
Et un film préféré
?
Celui
qui me fait le plus rigoler en ce moment, qui est sorti depuis longtemps mais
qui m’est resté dans la tête, c’est Brice de Nice ! C’est vraiment trop
drôle !
Aujourd’hui, avec
le recul, qu’est-ce qui te touche chez Jacquou ? Qu’est-ce qui fait, par
exemple, que tu aimerais bien être lui ?
C’est
qu’il est super courageux. Jacquou, c’est quelqu’un que j’admire. Il ne
baisse jamais la tête. Il fait des choses, il va au bout de ses envies et puis
voilà, même si ses parents meurent, il arrive à s’en sortir. Jacquou,
c’est vraiment quelqu’un. C’est un sacré bonhomme.
attaché de presse : Jean-Yves Gloor
paru le 13 novembre 2006
Connaissiez-vous le feuilleton Jacquou?
Non pas du tout. En revanche, j’avais lu le livre d’Eugène Le Roy et je trouvais l’histoire belle.
Quel a été le plus difficile pour vous, sur ce film?
Le tournage a été très rude, à l’image du roman. Nous avons tourné en Roumanie dans les Carpates et un peu en Dordogne. Mais dans les Carpates, nous étions dans des zones de montagnes très escarpées pour éviter les fils électriques, nous étions transportés à dos de cheval ou dans des carrioles. Après, il fallait jouer les scènes dans la neige, pieds nus.
Sortez-vous facilement d’un rôle?
Cela dépend, c’est très inconscient. Par exemple, sur Jacquou, j’étais en permanence en colère; à force de chasser l’injustice, j’engueulais tout le monde, cela correspondait à mon personnage. Je pense que techniquement, je ne peux pas jouer les choses si je ne les ressens pas profondément. Ce qui d’ailleurs est assez inquiétant! Mon acupuncteur dit que mon corps ne fait pas la différence; donc, la plupart du temps, je ressors vidée d’un tournage.
Propos recueillis par Chloé Sullivan, TV8 Lausanne (Suisse), 17 janvier 2007.